Frijh

Ici sont chroniquées les histoires des Etats et de leurs dirigeants

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Jejhi Bouhalrouz
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Inscription : 22 sept. 2008, 16:01

Frijh

Message par Jejhi Bouhalrouz »

LE jour moins un.

Jahal, cité joyeuse aux milles merveilles, aux adresses recommandées dans tous les guides touristiques, emplie de senteurs, de douceurs gastronomiques et de splendeurs architecturales. Située juste derrière la Vallée, on en voit déjà les marques d'activité. De longues trainées de fumées épaisses, méphitiques, signe de la prolifération industrielle et de bouffe synthétique produite en périphérie. Encore une journée de marche, peut être moins. Enfin ! Cela fait exactement onze jours que nos pieds foulent cette terre aride, sèche comme la vieille folle de notre dépôt, craquelée comme les toits de nos abris, rouge comme la gueule de nos camarades à force de trimer au soleil, comme celles de leur pères, attaqués par les effets sordides de l'alcool.
Nous avons voyagé à la recherche de nos familles, d'un destin plus jouissif, plus serein. Une démographie aux limites de l'acceptable nous poussa vers les ghettos des cités, et nos parents partirent travailler loin, dans les villes voisines. Notre survie ne tenait qu'à l'espoir de pouvoir les rejoindre un jour. Ce jour, nous allions l'atteindre au lieu de l'attendre, petit divertissement lexicale sympathique, usé sur les lèvres des courageux qui ont fait le déplacement.

Imaginez. Une ville dortoir, quasi ville poubelle, avec en son sein, comme uniques habitants, des enfants. Une moyenne d'age passant difficilement les douze ans, une vie devenue survie. Un ravitaillement toutes les semaines, de l'eau, des rations de bouffe produite par nos parents, et un seul camp de récupération des denrées. Leur obtention, un combat quotidien, un échange usuel, malsain. Une ration contre de la pierre. Tel était le deal. La pierre. Cette pierre coupante, radioactive, arrachée à la roche à des dizaines de mètres de profondeur, sous une chaleur de feu. Cette pierre servait aux mages de la cité, afin de préserver leurs biens, leurs familles, au dépit de tout sens logique, moral ou humain. Cette pierre, qui tua quelques milliers d'enfants par instants tragiques, en une fraction de seconde, par coup de grisou. Eh oui, la honte de cette civilisation qui gâchait le charbon pour la pierre contenue dans la roche, qui galvaudait ses enfants, enfin ceux de ses résidents les plus pauvres en dons magiques ou en crédits galacticains, ou tout simplement les esclaves, peuples immigrants de nations touchées par les dictatures ou les famines, afin de s'assurer une sécurité à toute épreuve.

Quelques jours avant notre départ, les rations n'ont plus été distribuées. Une hécatombe chez nos jeunes camarades nous poussa vers de nouveaux horizons. La question à peine poser, la réponse était toute trouvée. Direction la capitale. Jahal. Cette nuit sera la dernière avant l'entrée dans le lieu suprême de la décadence humaine.

LE jour.

Après une marche de cinq heures, nous sommes arrivés. Nous pensions avoir atteint le panorama de la joie et de l'abondance, mais il en fut autrement. La cité des merveilles semblait avoir été dévastée. Les fumées noires que nous pensions nocives étaient en réalité la résultante d'un brasier de chairs mêlées. De frissons nous avons été pris. Des pleurs, des malaises touchèrent la plupart de nos camarades d'expédition. Nous avons continué jusqu'aux portes de la ville, affamés par la marche et curieux de voir ce qu'il pouvait rester de la glorieuse cité. Des ruines. Voila ce que nous avons trouvé. Des cendres, des débris et autres déchets. Rien de récupérable, rien de mangeable. Nous avons continué vers les portes nord de la ville, à l'opposé. Une odeur pestilentielle, gerbante, nous colla pendant la traversée. Nos yeux n'osaient plus regarder, nos jambes semblaient nous porter d'elles même vers la sortie de ce carnage. Des lambeaux de peau trainaient un peu partout, sur les murs encore droits, sous nos pieds, dans l'atmosphère devenu irrespirable.
Arrivé enfin à la porte nord, nous avons aperçu des hommes. Ils chantaient et buvaient autour d'un charnier en feu. L'un d'eux croisa mon regard. Je me figeais. Tétanisé, le regardant prendre un fusil d'une longueur impressionnante, je ne bougeais pas. Il me braqua, lui et trois ou quatre de ses amis et cria des mots que je n'entendis.

"Slotan, il te demande de te baisser. Allez" Jejhi, un de mes compagnons mineurs, me tirait la manche pour que je m'abaisse. Rien à faire, je n'étais plus la. Une larme perlait sur ma joue, ma vision se brouilla. Le noir. Une sensation exquise m'enveloppa, puis une douleur étrange à la tête...

Un autre jour... 1er Galan 3727

"Les votes sont formels : Slotan Hidrovich est notre nouveau Roi"
Les acclamations de la foule qui portaient en triomphe le jeune roi frijhien saluaient aussi son engagement contre toute forme de vie esclavagiste. Il arriva sur la scène et déclara :

"Moi, Slotan Hidrovich, Roi de Frijh pour un cycle, élu du peuple qui m'a recueilli il y a quinze ans, jure fidélité au royaume des morts. Aussi, et par les pouvoirs qui me sont conférés, je promets à mon peuple une reconnaissance due à son rang, que ce soit à la corporation où au delà des frontières connues à ce jour.
Comme le veut la coutume, je me retire maintenant pour réaliser le sacrifice d'une innocente vertanienne, son corps sera offert aux chiens, afin qu'ils puissent reconnaitre le sang de nos ennemis.
Gloire au peuple de Frijh
".

L'assemblée repris en cœur les derniers mots de leur Roi, avant de festoyer comme chaque année lors de l'élection.
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