Au plus noir de la nuit, chapitre 1 : une ombre s'éveille.

Tout le role-play qui ne rentre dans aucune autre catégorie

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Ayma Warad
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Au plus noir de la nuit, chapitre 1 : une ombre s'éveille.

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L’attaque est frontale. Le coup direct. Mon épée est contrée tandis que l’ombre vient me percuter le thorax avec fracas d’un coup de pied latéral.

Je recule haletante. Mon arme va se disloquer si ça continue ainsi… Déjà l’ombre se réavance vers moi perfidement. Je me tiens prête.

Une voix lugubre, comme venant des profondeurs de la forêt résonne alentours.

Ta garde n’est pas assez haute. Tes ouvertures sont…

Elle disparait en une fraction de seconde pour réapparaitre l’instant d’après à ma gauche et me porter un nouveau coup. Je pare avec difficulté mais le plat de ma lame vient heurter mon visage sous la force du coup.

… sans pardon.

Je porte une main à mon visage ensanglanté, tout en reculant.

Tiens ta garde ! Je n’hésiterais pas à te trancher la gorge si tu la baisses.

Tu ne me fais pas peur !, m’écriai-je avec fureur, tout en relevant mon arme pour la énième fois. Viens donc !

Ah ! Que connais-tu de la peur fillette ?

Le néant envahit les alentours, obscurcissent ma vue. Plus aucun objet n’est perceptible hormis mon corps, plus aucune sensation hormis la perception du moi. Une illusion dont cet être à l’habitude.

D’un geste je dessine un cercle avec ma lame et me concentre. Dans sa descente j’entends une voix profonde, dans laquelle transcende la colère, surgir de partout à la fois.

Ta garde ! Je t’aurais prévenu…

J’expire doucement et profite de la descente de ma lame comme d’un élan avant de la lancer avec fracas droit devant moi.

L’illusion, tel un miroir brisé, se fragmente, se morcelle et se disloque comme un puzzle jeté à terre, mais je n’attends pas sa fin pour me mouvoir. L’ombre qui se dirigeait vers moi semble surprise. D’un geste leste je saute et m’abaisse auprès d’elle réalisant un large balayage de mes pieds. Une partie est traversée telle une vapeur brumeuse mais je trouve enfin prise et l’ombre bascule au sol.

Je me relève et saute sur elle afin de finir de la maîtriser. Mais d’une paume de main empreint de magie obscure elle me projette déjà plusieurs mètres plus loin me faisant atterrir avec fracas face contre terre.

Je suffoque au sol. L'évidence est là : j’ai perdu mon combat et suis à la merci de l'ombre.


J’ai à peine le temps de relever la tête difficilement qu’elle me toise déjà de toute sa hauteur, s’étant approchée de moi sans bruit et avec une étonnante rapidité. Allait-elle me battre à mort pour cet affront ?

Une main ténébreuse s’avance et me saisit par le col pour remettre sur pieds. Ses yeux lunaires contrastant avec le reste de son être semblent me percer.

Tu progresses, ma jeune apprentie. Tes talents en exorcisme se développent, mais ton cœur est encore bien trop pur pour les exploiter à leur plein potentiel. Nous reprendrons demain. Fais ton ouvrage et hors de ma vue avant que je ne t'étripe encore une fois...

Bien… maître, dis-je ayant toujours du mal à reprendre mon souffle.

D’un geste elle me relâche en me jetant au sol et disparait bientôt dans les ténèbres de la forêt.

Je reste allongée au milieu des herbes sauvages un moment, contemplant les étoiles qui se lèvent déjà là haut dans le ciel Vertanien.

Un cœur trop pur ? Quelle blague !


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Dernière modification par Ayma Warad le 22 févr. 2016, 12:12, modifié 2 fois.
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Ayma Warad
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Re: Au plus noir de la nuit.

Message par Ayma Warad »

Un réveil en sursaut dans une vaine tentative de me rattraper d’une chute onirique. Mes mains saisissent le vide au-dessus de moi tandis que je retrouve mes esprits.

Toujours ce même rêve. Toujours ces mêmes angoisses.

Et ce même visage qui me regarde chuter petite fille dans le gouffre d’un catalyseur de mana tandis que son vêtement est encore écarlate du sang de mes parents, de ma famille, de mes amies et que son visage ne laisse plus que passer une impression de dégoût et de joie morbide à la vue de ma mort attendue.

Oui toi pour qui je me damnerai. Toi pour qui m’as volé mon enfance, ma vie, tout ce en quoi je croyais et tenais du haut de mes neufs années alors.
J’avais erré à moitié brûlée par la charge magique, sans que personne ne se doute que puisse survivre à une telle fournaise de mana catalysé. Peut-être du fait de mes dons en exorcisme qui ont su atténuer cette énergie des mages ?

Mon esprit, mon cœur et mon corps étaient brisées.

Des esclavagistes m’avaient trouvée au coin d’une ruelle, jeune fillette frêle se laissant mourir au milieu des immondices. C’est sans volonté que je m’étais laissée prendre, et mise sur un marché comme un vulgaire objet de consommation. Mon corps n’était plus qu’une coquille vide.

C’est là qu’elle m’a trouvée. Dans ce cœur si vide l’ombre a su implanter et nourrir la passion de la haine et de la vengeance. Elle a fait en sorte que son combat devienne le mien par un jeu de causalité.

Il est dit qu’il y a deux façons de faire d’un homme son esclave : l’acheter, ou lui sauver la vie. Me concernant elle aura joué sur les deux tableaux. M’emmenant loin de ma terre natale pour m’y entrainer. Elle me formerait pour que je combatte pour elle, et me donnerait la force d’accomplir ma propre vengeance.

Je ne pense pas être la seule dans mon cas. L’ombre s’absente parfois sans prévenir, et ne revient que plusieurs jours après. J’étais habituée mais il y avait une règle : je devais être revenu chaque soir, qu'elle soit là ou non... aussi mes explorations alentours étaient-elles limitées. La seule fois où j'avais désobéi elle m'avait littéralement étripée, mon ventre en portait encore une large cicatrice .

Outre mon entrainement il me fallait tenir en ordre une petite demeure isolée dans les profondeurs de la forêt. Une grande bibliothèque pour me former en autodidacte aux choses de la vie et… beaucoup de solitude, de temps à ressasser ma vie misérable et à nourrir ce monstre qui grandissait en moi. Je ne m’en plaignais pas, l’ombre m’apprenait certes à surpasser l’adversité mais quelques journées sans recevoir des coups me permettaient de reprendre un peu de consistance.

Je finis d’errer dans mes pensées et me lève en même temps que le soleil commence son ascension. Cela fait maintenant quatre jours que l’ombre est repartie sans prévenir justement. Les ecchymoses violacées de mon dernier combat parcourent encore tout mon corps au teint mat. Quelques étirements et je vais à la cascade pour me rafraîchir un peu.

C’est une fois au milieu d’une eau azur qu’un fait s’impose à moi et m’oppresse.

On m’observe.


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Dernière modification par Ayma Warad le 21 févr. 2016, 14:40, modifié 1 fois.
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Ayma Warad
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Re: Au plus noir de la nuit.

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Une silhouette dans l’ombre à quelques distances de la berge. Elle semble me jauger en silence, son visage m’est totalement masqué par l’obscurité des arbres mais son aura ne laisse aucun doute à mon esprit quant à la menace potentielle qu’elle représente…

Mes vêtements sont trop loin… tant pis mieux vaut peut-être plonger sous l’eau et tenter de fuir de l’autre côté de la berge avant que cet être malfaisant ne m’attaque…

Un vrai poisson dans l’eau… dit une voix d’homme mûr déjà. Rien ne te sert de fuir jeune fille, tu n’es pas sur mon terrain de chasse et si c’était le cas tu n’irais pas bien loin accoutrée ainsi… et puis mon diabète m’a rendu si impuissant que mon animal totem est passé du tigre à la palourde, dit-il d’un ton neutre, indifférent mais rude.

Il s’avance doucement hors de l’ombre et se rapproche de la berge en continuant à me regarder de haut. Homme sans âge au bouc et à l’épaisse moustache avec un lourd fusil en bandoulière il vient me regarder de plus près comme une bête curieuse.


Plutôt jolie malgré tes cicatrices… Une fille du désert hein? Je me demande où elle peut bien vous dénicher tous… Quel pouvoir en toi peut bien l’intéresser ?...

C’est la première fois depuis des lunes, des années même, que je vois à nouveau un visage humain. Il m’intimide presque autant qu’il m’intrigue lui aussi. Qui peut-il être, lui qui semble connaître l’Ombre ?

Nous nous dévisagions ainsi un moment sans que mot ne soit dit.


Que fait-il là alors ? Peut-être n’est-il qu’une épreuve de plus que m’inflige l’ombre par ses artifices… Une hallucination ?


Etes… êtes-vous réel ?
, dis-je d’une voix fluette que j’ai pourtant essayé de rendre la plus froide et indifférente possible.

Petit froncement de sourcil de mon interlocuteur, qui porte la main à sa moustache la caressant doucement du bout de son index.

Tout dépend de ta conception de la "réalité", mais je suis assez réel pour te mettre une balle entre les deux yeux si tu poses trop de question, dit-il en grommelant. Daniel Von Herxeimer jeunette, Dany pour les intimes, si j’en avais... et je dirais bien « pour te servir » mais j’en ai bien rien à foutre de toi et des combines de ton dégénéré de maître.

Et bien que faites-vous là à me reluquer comme un pervers alors ?
, dis-je sur un ton de défi.

Il ne semble pas relever. Je sors doucement de l’eau toujours sur mes gardes, et vais enfiler quelques vêtements après un bien court séchage.

Le grand homme ne semble plus s’intéresser à moi outre mesure mais essaye frénétiquement de siffler pouce et index dans la bouche.

Bordel de… pourquoi ça ne marche jamais… Nestor, Nestor! Viens là sale dragon à trois sous si tu ne veux pas finir en sac à main !, crie-t-il à la forêt.

Je n’ai pas le temps de me demander qui est ce Nestor que les arbres tremblent derrière le chasseur et une immense bête semblable à un gros varan débouche le long de la berge . Un corps est placé dans sa gueule, il le relâche aussitôt au pied de son maître.

Bien c’est pas trop tôt, dit seulement l'homme à sa monstruosité avant de lui donner un coup de pied dans le flanc.

Il se retourne à nouveau vers moi tandis que je finis de me vêtir en lui fait face à bonne distance et il me désigne le corps inerte d’un jeune homme, à peine plus vieux que moi, au sol.

Je le laisse ici, occupe-t-en, il va surement crever de toute façon, les crocs de Nestor n’ont pas de poison mais trimbalent autant de maladie que son haleine est fétide, et c’est peu dire...


Il fait rouler avec son pied pourvu d’une large botte en cuir le corps du jeune homme au sol qui émet un difficile gémissement, semblable à un râle d’agonie.

Et dis à ton maître la noiraude que la prochaine fois, pacte ou pas, je ferais de la charpie du moindre de ses protégés qui s’aventure chez moi, le mur de ma cheminée ne demande que de nouveaux trophées !

Je ne sais pas quand elle rentrera... mais je lui transmettrais…

Son regard perçant et froid se pose une dernière fois sur le mien. Je ne lâche pas son regard avant qu’il ne commence à s’éloigner, un léger sourire au lèvre comme amusé de mon impudence.

Bien. Sur ce, jeunette…

Tandis qu’il disparaît avec son immense bestiole dans les profondeurs de la forêt je suis assailli de milliers de questions, de remords : pourquoi le laisser filer lui qui semble bien connaître mon maître, lui qui semble avoir bien des réponses, lui qui pourrait peut-être m’en apprendre plus… Au diable ce jeune humain à mes pieds, s’il n’a pas su résister mieux à ce chasseur c’est qu’il n’est qu’un faible, et puis ce n’est pas un fusil et une bête de foire qui vont m’intimider… après tout qu’ai-je à perdre ? L’ombre n’est pas là !

Tandis que j’esquisse un mouvement pour suivre ce « Von Herxeimer », une main vient me saisir la cheville, le jeune homme tout ensanglanté me regarde et dans un souffle lâche un :
« ne le suis… pas… il te tuerait… ».

D’un mouvement de pied je lui fais lâcher prise… Perte de temps. Pourtant mon regard est vite attiré vers les multiples cicatrices sur le ventre découvert du jeune inconnu, identiques à celle qu’à pu me faire l’ombre lors de ma plus grande désobéissance... Il me ressemble peut-être plus que je ne le pense…

C’est quoi ton nom ?


Za…zahir…

Bien Zahir, moi c’est Ayma… Je vais m’occuper de toi.


Peut-être n’a-il même pas eu le temps d’entendre la fin de ma phrase, Toujours est-il que lorsque je me penche plus sur lui pour l’examiner de plus près il n’a déjà plus conscience.

Le trimballer ne va pas être une partie de plaisir… Pourquoi diable ce chasseur de pacotille ne l’avait pas déposé devant la demeure de l’ombre ?


Hey! Crève pas, idiot !, lui dis-je en aspergeant d’eau visage et blessures afin de nettoyer des plaies déjà bien sales.

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Dernière modification par Ayma Warad le 21 févr. 2016, 14:44, modifié 1 fois.
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Ayma Warad
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Re: Au plus noir de la nuit.

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Je m’entraîne pieds nus sur d’immenses dallages grisés par le temps devant la demeure de l’ombre, réalisant divers enchaînements martiaux autant que de techniques de concentration et de maîtrise des flux de mana émanant de la forêt alentours.

Mon maître n’a pas refait surface depuis 3 semaines maintenant, et à moi de me coltiner quotidiennement les soins du bougre qui s’était fait prendre par ce mystérieux chasseur du nom de Von Herxeimer...

Zahir, m’avait-il dit s’appeler… Il avait déliré pendant une bonne semaine dans son lit, était même devenu totalement marbré à un moment, mais la mort après l’avoir effleuré ne semblait pas avoir voulu le dévorer encore. Voilà plusieurs jours maintenant que la fièvre retombait peu à peu mais la fatigue le rendait si confus que je n’avais pu tirer de lui aucune conversation bien intéressante.

A quoi bon le soigner d’ailleurs me suis-je dis plus d’une fois. Il ne survivrait pas à une réprimande de l’ombre dans son état actuel…

Il faut que cesse de penser à lui, ça ne me regarde pas ce qu’il peut bien lui arriver. J’ai toujours vécu seul depuis que l’ombre m’a receuilli. Je n’ai besoin de personne d’autre quelle pour exercer ma vengeance. Le moindre écart, le moindre écart dans mes sentiments, le moindre attachement, serait autant de temps perdu m’avait-elle dit un jour…

Il faut que je cesse de penser à lui.

Un bruit derrière sur le seuil de la demeure tandis que je suis au milieu d’un enchainement. Je m’arrête et me retourne brusquement. Perçant l’intrus d’un regard furieux.


Que fais-tu debout ? Je parie que tu tiens à peine sur tes jambes !

Ses traits sont tirés, son visage amaigri par les jours de maladies, pourtant Zahir m’adresse un sourire et lève sa main en l’air comme un signe que tout va bien ce qui le fait cependant se cramponner à la porte de peur d’être déséquilibré.

Continue je t’en prie, je ne voulais pas te déranger.

En 2 secondes je suis déjà sur lui et le projette à terre avec un simple balayage.

Mais tu l’as fait… Je continue si je veux et tu n’as pas ton mot à dire pauvre idiot.

Petit rictus douloureux de sa part, il prend le temps de s’asseoir avant de continuer comme si de rien n’était.

Je n’ai jamais voulu dire le contraire… Merci de t’être occupé de moi.

Je relâche ma garde.

Bien obligée, dis-je simplement. Comment es-tu tombé sur ce grand dadet de chasseur ? Pas de bol, mais peut-être valait-il mieux lui que l’ombre…

Oh tu ne l’avais jamais croisé encore ?, dit-il d’un air amusé tout en se malaxant doucement l’épaule. Peut-être lui avais-je déboité quelque chose dans la précipitation ?

Ce n’est pas la première fois que je m’enfuis… Mais aussi loin que j’ai pu aller partout autour de nous il est là… Comme si l’ombre avait ses possessions en plein cœur de son domaine. C’est la première fois que j’arrivais si loin… Tu es aussi une apprentie de l'ombre donc si je comprends bien ?

J’acquiesce, curieuse, lui tendant la main pour l’aider à se relever.

Ahah tu n’es pas du tout ambigue comme fille !

Il y en a d’autres comme nous ?

Il réfléchit un instant.

Tu es la troisième que je croise. Je dois dire que, bien que ton accueil est un peu… rude ce matin … tu es la plus sympathique. J’avais croisé une pseudo gothique la première fois qui m’avait dénoncé directement… et le deuxième que j’ai pu rencontrer n’était pas bien plus cordial. J’ai dû le battre pour qu’il me laisse filer mais l’ombre m'a vite rattrapé…

Soudain il devient livide, comme pris d’un doute.

Ca fait combien de temps que je suis là ? Tu n’as pas prévenu l’ombre quand même ?

Je fais un non de la tête.

Pas vue depuis 3 semaines, et toi ça doit bien faire un peu plus de deux semaines que tu squattes mon lit.

Il lâche un léger soupir de soulagement.

Bien il ne faudra pas que je tarde à me mettre en route alors… je croise les doigts ! Je suis persuadé de pouvoir trouver un chemin sans croiser ce maudit chasseur.

Il m’a dit que la prochaine fois il te tuerait, commentai-je. Je ne pense pas qu’il plaisantait. Et tu ne sembles pas encore en état d'aller où que ce soit.

Il lève son vêtement et me montre son abdomen certi de multiples taillades comme la mienne.

Comme je te le disais ce n’est pas la première fois que j’essaye de m’enfuir, l’ombre m’a dit la même chose que lui t’a dit : que la prochaine fois elle me tuera... Plus le choix ! Tu ne veux pas me suivre ?

Je recule de 3 pas, surprise de cette proposition mais me reprends bien vite.

J’appartiens à l’ombre… et puis elle me nourrit, me loge et m’entraine. Pourquoi partirais-je ?, dis-je, prise dans mes pensées. Et toi aussi j’imagine que tu lui appartiens...Repars d’où tu viens dès que tu iras mieux et prie pour qu’elle n’en sache rien.

Il s’avance vers moi d’un air de défi pour la première fois, chancelant mais déterminé, je recule à nouveau sans m’en rendre compte et me retrouve bloquée contre un mur, il point son index sur moi.

Moi aussi j’ai cru être sauvé par elle, mais elle ne fait que nous élever comme des bêtes destinées à l’abattoir ! Ma vie m’appartient et je ne la laisserai pas me la voler ainsi !

Reprenant mes esprits j’écarte sa main et le repousse à mon tour.

Je n’en ai cure de ce qui peut t’arriver. Mais si tu repars pour t’enfuir à nouveau ça va retomber sur moi quand l’ombre saura que tu es passé par ici. Je ne te laisserais pas t'enfuit à nouveau.

Alors on a un problème, déclare le jeune homme qui fait bien une tête de plus que moi. Je suis déçu qu’une fille du désert comme moi soit si peu empreint de liberté.

Ses yeux sont foncés comme les miens et il a le même teint mat que moi. Son regard si ouvert au début se renferme à ces propos.

Tu ne connais rien de moi, lui dis-je affrontant son regard.

Ni toi de moi…

J’hésite un moment, puis vais saisir un bâton que j’utilisais à l’entrainement et le pose au travers du seuil de l’entrée.

Tu sais te battre je suppose ? Quand tu te sentiras prêt pour partir franchis cette ligne. Tant que tu ne le fais pas tu peux te reposer autant de temps que tu veux ici, je t’apporterai ce qu’il te faut pour te rétablir… mais dès que tu le feras il faudra me battre. Si tu sors vainqueur je te laisserais filer là où tu veux. Si je sors vainqueur tu restes là ou rentres d’où tu viens, je ne dirais rien à l'ombre… Marché conclu ?

Il semble surpris puis réfléchit un instant à la situation.

Tu sais que le temps joue contre moi. Ce n’est pas très loyal comme proposition en sachant que l’ombre peut rentrer n’importe quand…

Et puis je pourrais toujours te dire que je rentre alors que je m’enfuis !

Tu as si peur de moi ?

Il me jauge un instant, puis un sourire en coin se dessine sur son visage.

Je ne vois pas de quoi j’aurais peur, je pense que c’est toi qui me sous estime… Faisons comme ça ! Mais…

Il prend le bâton et va le poser un peu plus loin en dehors de l’entrée.

...Quitte à rester là quelques jours encore le temps de ma convalescence, j’aimerais bien pouvoir venir prendre l’air et te voir t’entraîner.

Derrière ce masque qui me sert de visage j’esquisse un léger sourire, un comme je n’en ai pas eu depuis bien longtemps. Au fond de moi j’espére que l’ombre ne rentre pas avant ce jour où il voudra partir. Quelle étrange sensation.

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Dernière modification par Ayma Warad le 21 févr. 2016, 14:48, modifié 1 fois.
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Ayma Warad
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Re: Au plus noir de la nuit.

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Je m’entraîne au clair de lune, maniant mon arme avec autant de dextérité que ma concentration me le permet. Enchaînement fluide bien que lent, je réalise sans discontinu depuis le coucher du soleil diverses figures et pauses esthétiques.

L’épée comme toute arme doit devenir un prolongement du corps. Tant qu’on ne la ressent pas jusqu’à la pointe de sa lame elle n’est rien de plus qu’un outil tranchant qu’on agiterait fébrilement…


Je n’ai pas besoin de me retourner mais je sais qu’il est là, qu’il m’observe assis sur le palier depuis un moment déjà. Zahir se remet jour après jour. Chaque matin je vois son regard scruter l’horizon. Il ne tardera pas à vouloir partir je le sens.

Au cours des conversations que nous avions pu avoir il m’avait décrit son enfance de nomade dans le désert. Il n’avait jamais connu ses parents mais un oncle l’avait élevé comme son propre fils. Une tribu adverse les avait pris en embuscade un soir… Il avait été vendu lui aussi alors qu’il allait sur sa douzième année, racheté par l’ombre dans un bazar comme une simple marchandise. Là encore elle avait su remarquer un potentiel en lui…

Un potentiel… Il s’était bien gardé de me parler de ses capacités, restant assez évasif à ce sujet, je savais juste qu’il avait assez confiance en ses pouvoirs de mage… Lui par contre me regardait m’entrainer à loisir et des questions supposément innocentes sur le fond de mes capacités ne manquaient pas à la moindre occasion. Quelle bêtise je faisais là.

Mon enchaînement se finit par un simple moulinet du poignet avant que je ne saisisse mon épée dans son fourreau à deux mains et ne me penche pour la saluer.

Me retournant je vois en effet Zahir qui est là silencieux.


Drôle d’entrainement… Pourquoi laisses-tu ton épée à son fourreau ? Je n’en ai jamais fait mais j’imagine que le poids et la maniabilité sont tout autre. Tu serais plus en situation réelle avec la lame sortie...non ?, commente-il après un moment de silence à nous dévisager mutuellement.

Quand on sort une lame c’est pour tuer… Je m’entraine toujours ainsi…

Il sourit et me fait un signe de la main pour me dire d’approcher.

Je ne voudrais pas déjà dépasser la limite que tu m’as imposée… C’est l’ombre qui t’a appris cette règle idiote ? Ça ne lui ressemble pas !

Mon regard devient froid un instant, et ma voix de glace.

Non… c’est ma mère… j’étais petite…

Oh … Pardonne-moi j’ai des réflexions idiotes parfois…

Ce n’est rien…

J’avance doucement vers lui, il se relève à mon approche.

Je peux ?, me dit-il en me désignant mon arme.

J’hésite un instant puis la lui tends.

Je n’y connais rien comme je te le disais… Mais ça à l’air d’être du bon ouvrage. J’adore ces gravures sur la poignée. C’est un genre de sortilège pour empêcher tes ennemis de la dégainer ?

Je le regarde intriguée.

Non c’est juste joli... C’est son nom.

Ah., me dit-il un peu déçu. Ne le prends pas pour toi mais je trouve un peu idiot pour un mage de devoir se battre avec des armes conventionnelles... Alors donner un nom à son arme je t’avoue que ça me dépasse un peu.

Je reprends mon épée assez sèchement et lui adresse de nouveau un regard noir.

Mais je n’ai pas le monopole de la pensée ! héhé !, dit-il un peu gêné en se massant la nuque.

Il y a de grands mages avec des armes « conventionnelles » figure-toi.

Il me fait une moue moqueuse.

Kami Raykovith le fameux grand conseiller peu orthodoxe toujours un revolver à la ceinture?, commençai-je me remémorant quelques aventures historiques que j’avais pu lire dans l’impressionnante bibliothèque de la demeure juste derrière nous.

Bof, une renommée surfaite…

Et la redoutable Isthia Tadesh du Kitta armée de son managun ?

Une légende.

Et l’amiral William de Annebaut Lanthane du Lanthia et son sabre plasmique ?

Connais pas.

La prise du sénat ? L’ère Léviathanique ?

Il hausse les épaules, je souffle exaspérée.

J’abandonne. Tu m’as l’air aussi borné que tes préjugés sont idiots.

Il éclate de rire devant moi.

Tu peux parler Ayma !

Un sourire à nouveau sur le coin de mes lèvres. Je détourne les yeux. Quel est cette chaleur qui me parcoure les joues ?

Et du coup ton épée, comment s’appelle-t-elle ?, reprend-il voyant ma gêne.

Shen-Long : le dragon d’azur…

Voulant garder son sérieux un instant il finit par s’esclaffer.

Rien que ça ? Je vois bien un peu de bleu azur sur ta garde mais… tu aurais pu lui trouver un nom plus classe quand même… « Perfide » ? Ou la « grande perforeuse » ? Non non attends… La « grande faucheuse du néant profond » ? ahah !

D’un geste de ma main mon épée, restant dans son fourreau, vient se coller à sa gorge et il lève les mains comme pour déclarer sa défaite . Mais un éclair traverse ses yeux tandis qu’il me regarde tendant mon sabre devant lui.

Là… ta poitrine, elle… argh !

Je n’ai pas attendu la fin de sa phrase pour imprimer un léger mouvement au fourreau qui vient lui percuter la gorge et le faire suffoquer.

Tu en as d’autres des paroles lumineuses comme celle-là ?

Il reprend son souffle difficilement.

Non, non ce n’est pas ça ! Je m’en fous de ta poi… enfin non je veux pas dire ça... aaaaah ! La marque sur ton torse ! J’ai la même !

Il retire son haut pour me montrer les marques noirâtres sur son torse : une succession de mots composés de lettres d’un alphabet que je ne maîtrisais pas, et qui partent du cœur pour décrire une forme spiralée s’étendant progressivement, comme un tourbillon.

Oui je l’ai vu lorsque je m’occupais de toi… Un sceau étrange je n’arrive pas à lire l’écriture dans laquelle il est écrit…

J’hésite un instant, puis me découvre un peu pour lui montrer à mon tour la marque de mon sceau.

Moi non plus…, dit-il en examinant de plus près la mienne avant de s’éloigner en soupirant. J’ai toujours pensé que l’ombre l’avait mis sur moi pour me suivre à la trace et pouvoir me retrouver lors de mes fuites…, continue-t-il.

Je fais un non de la tête, réfléchissant à haute voix.

Je ne pense pas, me concernant les écritures s’étendent petit à petit encore… Pourquoi un tel sceau continuerait-il d’évoluer ?

Haussement d’épaules de sa part. Une brise de vent nous fait tous deux frissonner. Un bruit de rapace nocturne se fait entendre au loin tandis qu’un nuage qui masquait les étoiles s’éloigne petit à petit. C’est plutôt joli.

Il se rapproche de moi. Je reste sur mes gardes mais il me prend juste la main pour la pointer vers les étoiles.

Laisse-toi faire attends… Là, tu vois cette grande étoile plus jaune que les autres là-bas ?

Je me concentre et vois enfin l’astre qu’il me montre. Je lui lance un regard interrogateur.

C’est notre planète natale… Désertica, la plus noble des cinq, la planète des rêves, l’origine même de la magie et de la vie même disent certains… Elle est magnifique hein ? Tu verras, un jour on s’y retrouvera, loin de tous les tracas, loin de l’Ombre... parmi les nôtres, chez nous…Libres... Un verre de d'eau fraîche et pure d'une Oasis à la main... ou bien d'alcool... qui sait ? Tu vas bientôt avoir l’âge non ?, me dit-il avec un clin d’œil.

Je ne lui réponds qu’un vague : « oui, elle est magnifique... » perdue dans mes pensées.

Oui, elle est magnifique, autant qu’enchanteresse. Elle que j’avais tant voulu voir brûler entière rayonne comme une étoile. Elle me sourit tendrement ce soir comme une mère, me prend dans ses bras comme un père…

Une larme coule le long de ma joue. Je reste pourtant là à la regarder encore bien après que Zahir soit allé se coucher… Je ne me rends même pas compte en me couchant à mon tour, bien plus tard ce soir-là, que quelques lettres du mystérieux sceau sur ma poitrine se sont volatilisées.


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Dernière modification par Ayma Warad le 21 févr. 2016, 14:53, modifié 1 fois.
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Re: Au plus noir de la nuit.

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Tu es sûr de toi ? Je ne suis pas certaine que tu sois totalement rétabli…

Zahir comme à son habitude affiche un large sourire. Il se penche d’abord pour saisir le bâton au sol qui servait jusque-là de limite à ne pas franchir pour lui et me le lance. Je le saisis sans difficulté en un unique moulinet du poignet et continue de dévisager le jeune homme qui a su me sortir un temps de ma solitude.

Je le suis bien assez pour te mettre une raclée ma chère Ayma, dit-il en dépassant le seuil de la demeure, puis en descendant doucement les quelques marches qui mènent à la large terrasse dallée où je m’entraîne souvent.

Nous verrons bien.

Nous nous faisons face à quelques mètres l’un de l’autre. Nous contemplant, sans mot dire, pendant de longues secondes.

Je ne pourrais pas te faire changer d’avis j’imagine ?

Son air devient plus sombre.

J’ai trop attendu, tu le sais bien…, dit-il comme tiraillé par ses pensées.

J'ai longtemps cru que je me lèverais un bon matin en me rendant compte qu'il était parti durant mon sommeil. Je dois avouer que son côté homme de parole ou homme d'honneur m'a beaucoup surprise. Peut-être est-il aussi exalté que moi à l'idée de ce combat?

Et bien… comment procédons-nous ? Je n’ai pas envie de trop te blesser non plus toi qui m’a soigné. Quel ingrat je ferais !, continue-t-il retrouvant un peu de jovialité.

Je repose le bâton qu’il ma lancé, mon épée me suffira bien assez… et vais me saisir d’un foulard que je glisse à ma ceinture.

Si tu t’en saisis tu gagnes ?

Il cherche dans ses poches, n’y trouve rien d’intéressant.

Ca me va, attends…

Tu veux que j’aille t’en chercher un ?

D’un geste il déchire une manche de son haut déjà amochée et vient le glisser de même au niveau de son bassin.

Pas la peine. Réciproquement du coup ? Saisis t’en et tu gagnes?

J’acquiesce et m’éloigne de quelques pas. Me retournant j’expire doucement et le salue en joignant mon poing droit dans ma paume gauche et en m'inclinant légèrement.

Lui me regarde d’un air narquois.

Quand tu veux.

Honneur aux dames.

Je ne connais rien de ses facultés. Je ne l’ai pas vu s’entrainer une seule fois depuis son arrivée. Lui a pu voir mes techniques martiales, mais ne doit rien connaitre de mes capacités non plus… du moins je l’espère sinon mon handicap de départ est bigrement violent…

Je décroche le fourreau de mon épée de ma ceinture, et la brandit engainée dans celui-ci comme à l’entrainement.

Tu peux la sortir tu sais ? Elle ne me fait pas peur., commente-il.

Quand je sors sa lame c’est pour tuer, je te l’ai dit.

A la bonne heure ! Viens donc tigresse !

Il me fait un petit geste provocateur de la main et se concentre à nouveau.

Je prends, quant à moi, mes appuis doucement, puis commence ma course vers lui pour tout signal de départ. Une ligne droite jusqu’à lui, peut-être n’aurait-il même pas le temps d’incanter quoi que ce soit… J’avoue que ça me décevrait un peu de lui qui est si vantard sur ses capacités…

Il me regarde arriver sans broncher. Je ne suis plus qu’à quelques mètres de lui quand il lève sa main dans ma direction.


Non ça ne sera pas si facile, et j'ignore à quoi m'attendre.

Un éclair de magie arcanique fuse et me manque de peu tandis que je saute sur le côté et roule. Un autre s’enchaine immédiatement, puis un autre et encore un me faisant reculer petit à petit. Malgré l’aspect de flammes de ses sorts il ne s’agit là que d’ersatz, des flots de mana brutes dont il modifie l’apparence.

Je commence doucement, excuse-moi il faut que je me dérouille un peu!héhé !

Les flammes arcaniques fusent sans discontinu. Comment peut-il enchaîner ainsi ses sorts ? Il va s’épuiser !


Vantard.

J’ai beau esquiver sans trop de difficulté encore, je ne trouve pas le moyen de me rapprocher et les dallages éclatent alentours lorsque les sorts les percutent, les arbres voient leur troncs perçés, les herbes sauvages sont remplacés par des cratères noirâtres luisant encore de magma arcanique. Il faut que j’éloigne le combat, l’ombre va remarquer tous ces dégâts quand elle reviendra…

Et bien, et bien Ayma, tu es mage non ? Montre-moi un peu ce que tu sais faire sans tes techniques physiques !

J’attends pourtant et continue d’esquiver. Il semble comprendre que je cherche à éloigner les combats de la demeure et me suit sans discuter. Ses sorts se font moins fréquents également, je vois plusieurs failles à exploiter. Commence-t-il à s’épuiser ou est-ce une ruse ?

Je me fais plus prudente. Mon arme toujours en main je continue de le tester me rapprochant et me cachant entre les arbres avant qu’il n’arrive à se concentrer sur moi.

Ses coups ne perdent pas en intensité. Un seul jet de magie suffirait à me plaquer au sol s’il me touchait. Se restreint-il vraiment ?
Bon, finis de jouer. Je m’élance à nouveau pleinement vers lui comme au début. Il me regarde surpris. Et relève sa main à nouveau vers moi.
Les flammes arcaniques partent droit vers moi. Cela fait longtemps… pourvu que…

J’avance ma main gauche vers la flamme qui arrive à vive allure vers moi et décrit un arc de cercle de mon poignet mais aussi avec tout mon bras, comme pour les amortir. Elle ne me brûle pas mais je ressens pleinement sa chaleur douce issue du mana. Rien ne sert de la dompter... il suffit de dévier la force de l’adversaire... l'utiliser contre lui, le surprendre.

De mon autre main tenant l’épée je dirige le flux de mana vers Zahir qui me fait face et lui renvoie son coup. L’autre attaque qu’il préparait déjà est arrêtée immédiatement tandis qu’il esquive avec peine son propre sort retourné contre lui. Il ne m’en faut pas plus pour arriver à lui et lui asséner un premier coup de mon arme, qui ne tranche pas certes, mais qui vient se fracasser contre ses côtes en un point précis.

Argh !

Ma main se rapproche avec fluidité du tissu à sa ceinture. J’ai gagn…

Il me repousse tandis que mes doigts se referment sur le vide.

Un coup direct m’atteint qu’il n’a pas eu le temps de lancer à pleine intensité dans l'unique but de m'éloigner de toute urgence. Nous retrouvons tous les deux à suffoquer à quelques distances. Pas le temps de reprendre son souffle…

Cette fois c’est lui qui essaye de prendre ses distances. Il est bien trop près et il le sait.

Je dévie un autre flux de mana de pointe de mon épée imprégnée de ma magie annulatrice. Tandis qu’il en renvoie un autre je lance mon arme dans sa direction. Son attaque est percée, il esquive mon épée qui vient se fracasser contre un tronc,mais me voilà à nouveau à son contact, à mains nues cette fois.

Sa main s’enflamme d’un brasier arcanique léché d’étincelles violacées et il l’abat vers moi. Je pare sans difficulté déviant son poing de mon avant bras et lui assène un coup de paume dans le foie, un autre sous le sternum. Il se retrouve à genoux tandis que d’une main je saisis le tissu à sa ceinture et du pied opposé je viens le percuter comme on enfonce une porte et le projeter par terre. Le tissu glisse de sa ceinture et me reste dans les mains.


J’ai… gagné !

Je m’écroule à mon tour. Je dois avoir l’air bien pathétique à respirer aussi bruyamment pour reprendre mon souffle. Pourtant un sourire de satisfaction évident illumine mon visage.

Hey t’as vu ça ?! T’es pas mort au moins ?

Grognement de la part de l’intéressé qui se relève difficilement.

De tous les mages possibles il a fallu que je tombe sur une exorciste. Bien ma vaine, même si je me doutais bien d’une connerie comme ça…

Un petit rire m’échappe. Je m’assois dans l’herbe et regarde le ciel bleu là-haut, rêveuse, tandis qu'il vient se tenir près de moi un peu chancelant encore.

Ça fait longtemps que je ne me suis pas amusée autant. Ce fut un vrai challenge !

Tu l’as dit. J’espère que tu m’accorderas la revanche un jour !

Je souris à nouveau. Il va donc se ranger selon les modalités de notre combat : s’il gagnait il pouvait partir, libre de se faire traquer par l’ombre, s’il perdait il devait m’écouter et essayer de retourner d’où il était parti dans l’espoir qu’elle ne se rende pas compte de la supercherie ! J’espère de tout cœur que l’Ombre ne remarquera pas son absence. Peut-être pourrons-nous nous retrouver de temps à autres lui et moi? Peut-être que…

Ayma…

Oui Zahir ?, dis-je distraite, encore dans mes pensées.

Je suis désolé.

Un coup violent à la nuque. Le temps d’une seconde la douleur est atroce, puis tout devient noir.

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Dernière modification par Ayma Warad le 21 févr. 2016, 14:01, modifié 1 fois.
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Ayma Warad
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Re: Au plus noir de la nuit.

Message par Ayma Warad »

Une violente douleur à l’estomac.

Qu’est-ce que ?

Une autre, brutale, dans le bas du ventre.

Qu'est ce que je fais là ?

Une enfin, en plein sternum, vient me couper le souffle brutalement et me faire tousser.

Arrête Satoru ! Tu vas la casser, dit une voix enjouée.

Elle va peut-être te bouffer une fois réveillée grand frère Satoru !, surenchérit une voix enfantine semblable à la première mais venant d’un autre côté.

La ferme, vous deux. J’aimerais bien voir ça. Elle a juste l’air d’une misérable bon à rien celle-là, elle mérite que ça !, dit une voix d’homme juste au dessus de moi.

Un autre coup violent dans la cuisse me fait comprendre que c’est ce dernier qui enchaine des coups de pieds sur mon corps au sol depuis quelques temps déjà. La douleur se fait de plus en plus intense au fur et à mesure que je me réveille. Je me protège comme je peux de mes mains endolories.

Ohhhhh grand frère ! Tu l’as réveillée !

Elle ressemble pas trop à un fugitif dis donc, maman nous a dit de retrouver un homme.

Tu as vérifié sous sa jupe Satoru ?

T’es un pervers grand frère, on te reconnait bien là.

La ferme vous deux !

Je lève le regard vers un homme, en belle tenue et aux cheveux gras et luisants pourtant bien rangés, qui me dévisage avec un regard haineux de toute sa hauteur. J’écarte difficilement un coup qu’il essaye de me donner. D’un geste de son pied il isole ma main et m’écrase douloureusement les doigts.

Ahhhhh !

Alors gamine, j’espère que tu n’en as pas encore eu assez, j’en ai des centaines comme ça ! La souffrance ça me connait.

Il se penche sur moi et me saisit le visage avec agressivité et fermeté me compressant douloureusement les joues contre ma mâchoire. Un filet de sang se met à couler de ma bouche.

On cherche quelqu’un et je suis sûr que tu vas pouvoir nous renseigner.

Il relâche son étreinte et vient me saisir les cheveux pour me plaquer la tête contre le sol. Je n’ai pas le temps de réagir, même mes idées ne sont pas claires. Du sol je distingue deux autres personnes plus jeunes, au cheveux ébouriffés et grisés, chacun sur une branche d’arbre. Ils balancent tous deux d'immenses faux, chacun la sienne, à la façon d’un pendule au ras du sol. La seule différence perceptible entre eux depuis ma position est que l’un deux est vêtu en noir, l’autre en blanc. Des jumeaux ?

Maman ne sera pas contente si tu la casses, dit l’un des deux jeunes d’une voix toujours aussi enjouée.

Maman n’aime pas quand on casse ses enfants, surenchérit l’autre. Il n’y a qu’elle qui a le droit.

Taki, Taka : la ferme !, s’énerve l’homme qui me maintient la tête au sol.

Se concentrant à nouveau sur moi, il poursuit :

On recherche un déserteur de la part de l’ombre. Un certain "Zahir" : grand, un peu plus jeune que moi. Aussi halé que ta face de trop cuite au soleil. Ne dis pas que tu ne l’as pas vu on est allé fouiller chez toi, et on a suivi ta trace et la sienne jusqu’ici… On connait sa magie.

D’un coup sur son appui je lui fais perdre un temps son équilibre. Il se reprend bien vite et continuant sa saisie sur mes cheveux il vient me soulever par eux et me relève avec douleur.

De son poing libre il vient me frapper en plein dans les côtes.


On se rebelle hein ? Ici c’est moi qui fait la loi tu sais ? Celle du plus fort.

Si l’ombre à quelque chose à me demander… elle n’a qu’à venir elle-même… , dis-je haletante. Me remémorant peu à peu les derniers événements.

Mon regard haineux ne semble pas le perturber.

Je vois sa main prendre du recul et venir me gifler brutalement, me projettant à terre.

Arrêêêêête Satoru ! C’est notre sœur aussi ! Non? dit la voix d’un des deux posté sur sa branche.

Oui graaaand frère ! On aime pas beaucoup qu’on s’en prenne à notre famille.

J’essuie doucement un nouveau filet de sang à ma bouche tout en me redressant.

Taki et Taka ? Leur visage de pré adolescent et leur voix prépubère ne me laisse pas deviner de quel sexe ils sont. Des trois ils ont l’air d’être les deux les moins inamicaux. Mais le sourire vide qu’ils affichent tous deux me gêne profondément.

La ferme vous deux ! Je me demande bien pourquoi l’ombre m’a coltiné deux abrutis pareils pour cette traque ! Je ne suis le frère d’aucun demeuré comme vous !

L’homme dénommé Satoru sort une dague de sa ceinture et se rapproche à nouveau vers moi.

Maintenant. Tu vas parler et me dire où il est allé. Je te jure, sur tous les dieux existants et imaginables, que je vais te couper les phalanges une par une, et si tu n’en as plus de découper les avants bras en lamelle, petit bout par petit bout... jusqu’à ce que tu me dises où est parti cette ordure de Zahir. Et crois moi, tu ne crèveras pas d’hémorragie…

Une flamme luit un instant dans sa main gauche, me montrant ses compétences de mage de feu. Il me fait comprendre qu’il me cautérisera ci-tôt un de mes membres amputés…


Tu n’es pas notre grand frère ?, dit la voix d’un des deux enfants, dont l’immense faux à arrêter de battre au vent et le sourire vide s’efface un instant.

Tu nous avais dit que tu l’étais… Tu es bien élevé par maman toi aussi non ?

La ferme vous deux ! Où je vous tue en premier ! L’ombre m’a entraîné comme vous, mais l’idée que nous soyons frère me fait gerber ! Vous rêvez !

En un battement de paupières, l’un a déjà disparu de sa branche.

Et toi… tu es notre grande sœur ?, me demande une voix juvénile à mon oreille juste derrière moi. Celui de l’enfant en noir.

L’homme appelé Satoru, perd totalement patience et donne un coup de dague dans le vide pour l’éloigner, puis un autre. L’enfant avec son sourire vide derrière moi, esquive sans rajouter mot. Une entaille vient apparaître sur ma joue d’un coup perdue du dénommé Satoru.

Que puis-je faire dans cette folie ? Les coups reçus m’ont vidée, mon dernier combat également, j’ai les membres transis de froid, je suis paralysée par la peur devant cette bande complètement hors normes et… je ne sais même pas où à pu partir Zahir… Lui qui m'a trompée... abandonnée...

Peuh ! Vas-y dégage avant que je ne te crame Taki ! A nous deux la Desertica ! Crois bien que tu vas crier et me supplier comme une put…

Oui je suis votre sœur !

Ta gueule quand je parle, lâche Satoru en me giflant à nouveau.

Le temps que je ferme les yeux pour me protéger et que je les réouvre. Le deuxième enfant vêtu de blanc a déjà quitté sa branche. Un bruit discret et je relève les yeux vers un Satoru aux yeux écarquillés, se tenant le ventre. Un autre bruit coulissant laisse finalement paraître le bout d’une lame, celle d’une faux au travers des boutons de la chemise propre de Satoru, qui se met à se couvrir de sang de façon pulsatile.

Lui ne peut que contempler son trépas. Une lueur vient brûler son torse dévoilant une marque runique semblable à la mienne au niveau de son cœur qui scintille un instant tandis que des écritures se propagent sur son corps et que ses yeux se gorgent de noir. Mais ces derniers reprennent bien vite leur teinte naturelle, avant de se vider totalement de toute lueur de vie.

La faux est retirée et le corps s’écroule au sol dans une marre de sang et d'entrailles dévoilant l’enfant vêtu de blanc, maintenant à l’habit et au visage recouvert de fluide écarlate.

D’une main il vient se nettoyer son visage couvert du sang de Satoru et se la lèche pensivement tout en me dévisageant longuement avec un petit sourire.

L’autre, vêtu de noir, à mon arrière vient se jeter sur mes épaules et m’enserre, laissant sa faux plantée dans le sol.

Je suis trop content d’avoir une nouvelle grande sœur ! Tu t’appelles comment ?

Sur quels monstres suis-je tombée ?

Ay… Ayma…

Oh ! Ayma ! Moi c’est Toki, et lui c’est Toka!, dit-il en désignant son frère encore en train de se lécher la main ! J’étais trop déçu qu’il dise ne pas être notre grand frère finalement, Satoru… Je l’aimais bien moi ! Mais on frappe pas sa sœur déjà, alors s’il n’était même pas dans la famille on pouvait pas laisser passer ça…

Je l’aime bien comme ça aussi, dit simplement Toka.

Oh laisse moi goûter!, dit Toki, sautant de mes épaules pour se baisser vers le corps de Satoru.

Toka me dévisage un instant, puis s’abaisse avant de se redresser en me tendant une main découpée de Satoru.

Tu en veux grande sœur ?

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Ayma Warad
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Re: Au plus noir de la nuit.

Message par Ayma Warad »

Je le regarde, affolée, me tendre ce membre arraché avec un large sourire tendit que son jumeau se goinfre allègrement sur le cadavre au sol, comme un enfant gourmand le ferait devant des petits toasts ou gâteaux apéritifs retirant petits bouts par petits bouts la chair de Satoru.

Ben quoi grande sœur ? Tu n’as pas faim ?, me demande Taka.

Elle est peut-être malade ? , renchérit Taki relevant ses yeux vers moi, le pourtour de la bouche plein de sang.

Je m’affole à cette vue démente : fuir, il me faut fuir. Si je reste avec ces deux anthropophages je finirais comme leur précédent camarade.

Allé mange grande sœur ! Ca va te redonner des forces.

Et en plus il est super bon !

J’ai un mouvement de recul, un pas, puis l’autre, je n’arrive pas à réfléchir posément devant cette situation improbable. Ils remarquent ma gêne, et me regardent interrogateurs.

Je ne peux pas… Ce n’est pas humain ce que vous faites !

Pas humain grande sœur ?

Mais nous ne sommes pas humains…

Nous sommes des ombres…

Tu es humaine toi ? Tu n’es pas notre grande sœur ?

Je vois Taka se saisir de sa faux et l’instant d’après arriver déjà sur moi sans que j’ai le temps de réagir. Ses déplacements dans l'espace son quasi instantanés.

On va peut-être te dévorer aussi alors, tu as l’air bonne !, me dit-il d’un sourire dément !

Arrête !, s’écrie Taki, vérifie avant…

D’un geste Taka arrache une partie de mon haut. Dévoilant le sceau écrit en spirale autour de mon cœur. En le voyant il relâche son étreinte et murmure un léger : oh, désolé grande sœur…

Taki vient le rejoindre en sautillant tout heureux, cachant quelque chose derrière son dos, et lance un sourire complice à son frère.

Alors comme ça grande sœur Ayma n’a pas encore activé son code B ?

Il semblerait, dit Taka en me dévisageant intensément, d’un regard malin.

Je ne comprends rien à ce que vous me dites. Vous parlez de mon sceau ? Vous savez comment l’activer ? A quoi il sert ?

Taki et Taka se penchent vers moi tout sourire.

Elle ne sait pas, c’est donc ça ! C’est toujours rigolo la première fois !

On apprend à ne plus s’en passer après !

On est des ombres comme maman nous a fait.

Le code B remplace notre cœur et se nourrit de l’inhumain.

La haine, l’amour de la souffrance, en torturant par exemple, le meurtre… mais aussi…

Taka se jette sur moi avec un rire dément et me maintient la bouche ouverte m’écartant les machoirs avec une force surhumaine tandis que ses yeux se remplissent d’obscurité. Taki termine alors sa phrase en me remplissant allègrement la bouche de ce qu’il tenait dans son dos, me forçant ensuite à avaler tandis que je suis pris de hauts le cœur de dégout.

... manger son prochain.

Ils me relâchent alors tous deux en riant tandis que je me retrouve à 4 pattes la bouche pleine d’un sang qui n’est pas le mien en train d’essayer de me faire vomir. Mais bientôt je n’essaye plus. Une idée s’impose à moi tandis que je ne sens plus ma souffrance, mais que tout autour de moi me paraît tout à fait clair : je vois dans l’obscurité comme en plein jour, j’entends cet animal à 50 mètres de hauteur en haut de son arbre, je sens la caresse du vent silencieux contre ma joue, et je sens, je sens….

J’écarte Taka d’un coup qui le projette contre un arbre d’une force que je ne connaissais pas. J’entends Taki se moquer de lui mais mon intérêt n’y est pas, attirée par une douce odeur qui me donne envie... attirée par une faim insoutenable qui ne demande qu’à être comblée.

Le corps de Satoru qui gît à quelques mètres sur le sol.

Je m’élance avec force, remarquant à peine que mon sceau se brise et se libère sur tout mon corps : des lettres et phrases incompréhensibles écrites dans un noir profond le parcourent en ondulant doucement. Qu’importe ce n’est plus moi. Ce corps ne m’appartient même plus. Ma raison l’abandonne pour mon envie insatiable.

Ce n’est que quelques minutes plus tard, dans une lueur de lucidité et de prise de conscience qui m’éclaire à nouveau un court instant que je remarque dans une marre de sang qui reflète mon visage au clair de line que mes yeux également n’ont plus rien d’humain. Leur conjonctive est d’un noir profond tandis que mon iris à pris une teinte rouge sang.

Je porte mes mains encrassées de chair et de sang à mon visage qui ne présente pas mieux.

Je ne suis plus humaine c’est ça ?

Non grand sœur.

Enfin, tu l’es toujours si tu veux. Mais le code B de maman te donne bien plus.

Tu es une ombre.

Tu ne redeviendras humaine qu’à ta mort.

Plus rien ne sera comme avant…

Non…

Cette voix ne vient pas d’eux, elle résonne dans ma tête et s’impose à mon esprit. En fermant mes yeux je visualise un autre moi me faisant face, ayant la même consistance, le même aspect que l’ombre mais dont je distingue encore les formes et mon visage obscurcit.

Maintenant tu feras avec moi Ayma, car je suis toi, ton toi qui a dormi si longtemps et qui ne demande qu'à se réveiller.

Je pourrais aussi me donner la mort… je me dégoute tellement. Je n’ai jamais voulu ça.

Si tu l’as voulu Ayma. Tu veux te venger n’est-ce pas ? De cet être méprisable qui a tué ta famille, ruiné ta vie… C’est pour ça que tu as laissé l’ombre t’entrainer…

Je suppose. Je ne suis plus sûre de rien.

Laisse-moi être sûre pour nous Ayma.

Ai-je le choix ?



Pourrais-je enfin le tuer si je te laisse mon cœur ?

Un sourire s’affiche sur le visage du moi obscure.

Tu dévoreras même son cadavre : Al-Rhazès payera !

Alors je suis à toi...

Non... je suis toi, me dit mon ombre en me caressant doucement la joue d'une main froide comme la mort.

Je réouvre mes yeux emplis d’obscurité sur un Taki et un Taka penchés vers moi avec la même expression vide qu’à leur habitude.

Et maintenant, on continue notre traque à trois ou on va prévenir maman que tu t’es éveillée au code B ?

Duuuuur de choiiiisir !, s'écrie un Taki surexcité.

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