Sous les ruines du Karamdaï

Tout le role-play qui ne rentre dans aucune autre catégorie

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Lilou
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Sous les ruines du Karamdaï

Message par Lilou »

Quelques semaines se sont passées depuis mon évasion de la cité Bunker du Zardoz. Des jours durant j'ai essayé de me débarrasser du collier qui m'enserre le cou, seul témoin de mon dernier supplice. Mais l'évidence est là : je n'y arrive toujours pas. La conception de son alliage revêt des métaux qui me sont encore inconnus, inaccessibles à mes pouvoir de mage de métal. Pour l'instant du moins. Il me faudra probablement des semaines de doutes et de fuite avant d'arriver à m'en débarrasser.Au moins ai-je pu récupérer un peu sur le plan physique... psychiquement les cicatrices resteront néanmoins, elles aussi, pour un temps.

Les souvenirs me reviennent au compte-gouttes. Des moments où je servais encore le Zardoz par intérêt, d'autres où je fus forcée jusqu'à faire d'horribles choses. Des épisodes plus lointain également me sont revenus : des bouts de mon enfance, d'autres où l'homme qui me hante désormais l'esprit se tenait encore non loin de moi... Je me raccroche à eux dans l'espoir un peu fou qui me pousse jusqu'ici afin de découvrir ce qu'il est advenu de lui... Kami, où es-tu?

Des rumeurs, des dires... j'ai pu entendre tout et son contraire tandis que je me renseignais ces jours derniers. Le grand conseiller Raykovith, sa grandeur, la chute du conseil, jusqu'à sa mort sur une terre de glace... des balivernes! Kami, celui que j'ai connu,celui que je respecte comme mon maître, lui même que je tiens en si haute estime, celui que... j'aime... peut-être... non lui, ne peut mourir ainsi. C'est risible que de penser ça!


Une secousse. Je regarde au travers du cockpit du chasseur biplace qui parcourt les cieux de la planète volcanique, à bonne altitude, et qui semble maintenant entamer une descente douce.


Un petit trou d'air, rien de grave ma'mzelle.

Je ne m'inquiète pas, vous avez toute ma confiance.

Un pilote, il a bien fallu en trouver un. Je pars à nouveau de rien. Aucun fond, aucune attache... J'ai pu troquer l'uniforme de soldat du Zardoz contre quelques changes féminin et une tenue volcanienne plus typique chez un revendeur. Du reste j'ai du me résoudre à revendre un peu de mon précieux Cristacier afin de me payer de quoi vivre et surtout ce voyage vers le Karamdaï. Le pilote est un ancien mercenaire désormais à la retraite. Vivant seulement d'une petite pension et de quelques courses douteuses, il n'a pas craché sur ma proposition de venir me déposer sur cet état déchu du Kamagma contre une somme pourtant pas si élevée... L'avantage de sembler être une jeune femme bien fluette aux yeux d'un véteran en quête de gestes chevaleresques à sa portée.

Bientôt l'ancienne citée est en vue, et le vaisseau commence à décélérer et à tourner doucement autour de l'ancienne capitale.

Le Karamdaï, commente le pilote. Ancienne cité prospère, j'y suis allé plusieurs fois pour de la négoce dans le passé. Elle a un peu perdu de sa superbe.

Les restes de l'ancienne ville se tiennent sous nous près d'un immense lac de magma. Des ruines à perte de vues, sur une bonne partie de la ville basse les bâtiments ne sont même plus présents, seuls des cratères profonds subsistent, dont un immense qui semble avoir dévoré le tiers de la ville à lui seul. Simples témoins d'une ancienne guerre nucléaire que même les puissants boucliers magiques de la ville n'ont pas su endiguer. Une partie de la ville haute se dresse pourtant encore, dont l'immense palais maintenant simple spectre d'une grandeur passée.

Je ne vois toujours pas ce qu'une jeune fille comme vous vient faire dans ce trou du cul du monde, sauf vot' respect mam'zelle. L'est encore temps de faire demi-tour si jamais...?

Non, merci Lucien, c'est parfait. Vous pouvez nous poser non loin du palais?, dis-je d'une voix posée. Je me débrouillerai ensuite sur place.

Comme vous voulez, c'est vous le patron, si j'puis dire. On attend juste l'accord des gars en bas. Faudra montrer patte blanche pour eux aussi si vous voyez ce que je veux dire. 'Vont se poser bien des questions.


Mon pilote m'a en effet fait part des nouveaux locataires du Karamdaï : en fait une poignée de pillards et prospecteurs qui ont dressé là un nouveau champ de force permettant la vie à l'air libre en bas. Un ramassis d'opportunistes qui ramassent ce qu'ils peuvent trouver pour la revente. La cité en ruine doit receler de véritables trésors pour eux. Et je n'ose imaginer à quel point l'intérieur du palais a pu être dénaturé par leur présence. Mais pour peu que je leur verse une somme correcte ils ne devraient pas trop m'embêter dans mes recherches... Que pourrait leur dérober une femme seule et sans autre moyen de transport sur ce terrain de jeu qui est maintenant le leur depuis des mois sinon des années?

Le signal est donné et notre chasseur entame son atterrissage, traversant une légère coupole énergétique protectrice aux reflets bleutés.

Je ne trouverais peut-être rien ici. Ce n'est qu'une conviction délirante, une hallucination de prisonnière, qui me mène en cette ville fantôme. Pourtant j'en ai besoin, une sorte de pèlerinage dont je ne saurais me passer pour continuer à avancer.

Si seulement...
Dernière modification par Lilou le 30 déc. 2015, 15:09, modifié 1 fois.
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Lilou
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Re: Sous les ruines du Karamdaï

Message par Lilou »

D’accord. Pour cette somme on peut vous autoriser la promenade dans notre domaine pour les 48 prochaines heures, dit un grand homme dont le masque à gaz pend doucement au niveau de sa poitrine en comptant une liasse de billets génériques que je lui tendais à l’instant.

Je n’en attendais pas tant, merci, dis-je en m’inclinant doucement auprès du fossoyeur qui semble être le chef d’un groupe venu à notre rencontre après que nous soyons descendus de notre chasseur.

Comment ces pilleurs osent-ils appeler cette terre « leur » domaine ? Rien de plus que des profiteurs qui se gavent des malheurs de pays de Galactica et émigrent ci-tôt les richesses d’une civilisation passée toutes dissipées après en avoir sucer la substance jusqu’à la moelle... Des charognards en soit, dont l’accoutrement en lourdes tenues étanches, casques à lunettes anti-UV et masque à gaz leur permet de se déplacer facilement sur les différentes scènes de carnages.

Cependant ils permettent, tels des insectes contribuant à la décomposition des corps et leur retour à l’état de nature, de rendre à nouveau vivable des zones condamnées. Combien d’années encore le Karamdaï n’eut pu souffrir de visite sans tenue anti-radiation ou de protection thermique s’ils n’avaient été là ? Le bouclier établi sur la large zone de l’ancienne capitale semble être en plus un signe de leur capacité technologique avancée malgré leur tenue peu ragoutante et le fait qu’ils sentent, je dois le dire, affreusement mauvais.


Vos affaires ici ne nous regardent pas mais croyez qu’on est bien étonné de ce genre de visites . Vous venez pleurer des proches disparus du coup ? La majorité a jamais été enterrée, on a laissé tout ce qui n’a pas de valeur en état vous savez ?, continue le chef des pillards. Si vous voulez, pour un peu plus de crédits, je peux vous fournir un de nos hommes avec son fouisseur pour vous aider à retrouver vos macchabés ?

Il me désigna une des bêtes étranges et repoussantes qui les accompagnent. Elles ont la taille d’un chien, une couleur brunâtre et des petits yeux larges et noirs qui semblent vous regarder fixement, mais une forme tout en longueur, deux longues antennes, et six paires de pattes velues font vite comprendre que ces choses tiennent plus de l’insecte que du mammifère, émettant par intermittences de stridents crissements plutôt perturbants.


Je… m’en passerai. Je compte pouvoir terminer mon deuil seule, vous comprenez?

Boarf, si vous avez besoin demandez Charlie, contre un peu d’autre monnaie on pourra vous donner de quoi grailler… Et on a un départ pour revendre notre camelote aux différentes cités adjacentes dans 48h justement. Si jamais vous voulez vous mettre entre 2 sacs de fret on pourra vous faire une ch’tite place.

Il s’adresse alors à mon pilote en le pointant du doigt, de derrière ses épaisses lunettes de protection on peut deviner un regard menaçant.

Par contre, vous, vous payez pas vous restez pas ! Serez gentil de libérer l’air d’atterrissage pour de potentiels prochains vaisseaux sur l’heure !

Peuh ! Je vois pas qui vous pouvez bien attendre, c’pas le genre des gens des villes de se mêler à vous, lui rétorque Lucien.

Pour toute réponse le chef des fossoyeurs lève son majeur et s’en retourne avec sa clique vers ce qui semble être un petit camp qu’ils ont installé en contrebas.

Lucien grogne un peu tandis que nous les regardons s’éloigner puis me donne une dernière mise en garde.

Méfiez-vous d’eux tout de même mam’zelle. Sont pas connus pour être des tueurs, mais même s’ils sont pas courageux pour un sous, ils aiment l’argent facile si vous voyez ce que je veux dire.

J’y penserai Lucien. Merci pour tout.

Il me lance un dernier sourire un peu triste, et puis disparaît bien vite dans son vaisseau. Je reste non loin de la piste le temps du décollage et lui adresse un dernier signe de la main tandis que son chasseur disparaît bientôt parmi les épais nuages volcaniques.

Seule… Je suis peut-être fait pour le rester… Ma punition pour ne pas avoir suivi Kami jusqu’au bout…

Comme je regrette.


Grrrrrrrrriiih !

Un sursaut, une des bêtes appelées fouisseurs se tient à quelques pas de mois. Un peu plus loin un des pilleurs, lunettes et masque portés me dissimulant totalement son visage, me regarde immobile plusieurs secondes, contre le vent. Au bout de quelques secondes il lève doucement son index droit et le place sous son œil. Puis il disparait après avoir rappelé sa bête dans un léger sifflement dont je ne sais la provenance. Ces gens ne sente certes pas la rose, mais malgré leur lourd accoutrement je dois dire qu’ils sont particulièrement silencieux lorsqu’ils se déplacent…

Message comprit. On me surveille.


Moi aussi je connais des choses sur ces terres, je ne me rappelle probablement pas de toutes, et n’en ai surement jamais su la plupart, mais je n’aurais jamais la prétention d’appeler cette terre mon « domaine » … . Il n’y en avait qu’un qui n’avait jamais pu dire ça…
S’ils comptent sur moi pour leur livrer de potentiels secrets cachés du Karamdaï ils se le fourrent dans l’œil leur doigt …
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Lilou
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Re: Sous les ruines du Karamdaï

Message par Lilou »

La haute ville a su mieux résister à la catastrophe nucléaire. Des sites d’explosions plus lointains, des bâtiments à l’architecture et aux matériaux plus robustes se tiennent toujours de part et d’autres des rues autrefois bourgeoises de ces quartiers. Sous les différentes couches de débris et de poussière on peut cependant discerner que le niveau du sol à monter de plusieurs centimètres depuis le dernier jour du Karamdaï, donnant l’impression que les bâtiments s’enfoncent peu à peu dans le sol, comme pour faire disparaître des reliques du passé. Les devantures autrefois aguicheuses et hautes en couleurs des commerces étaient devenues pâles comme la mort. Et de profondes entailles et brèches parcourent les bâtiments, quand ceux-ci ne sont tout simplement pas décapités de leur toiture, comme une marque de l’agonie qu’a subit la ville en des temps pas si anciens.

Je marche au milieu de ces ruines si familières un long moment. De ci, de là des scènes d’un passé plus heureux me reviennent, comme des scènes fantomatiques prenant tout à coup vie dans cette ville de mort et de désolation. Seul le palais, semble avoir été relativement épargné, mais de loin seulement, l’essentiel de l’infrastructure semble intacte, et il se dresse au-dessus de la cité en ruines comme attendant d’être dévoré, peut-être dans quelques centaines ou milliers d’années, par le lac de magma ou par quelques autres explosions volcaniques de cette planète de feu.

Mes pas me portent tous seuls, j’arrive maintenant dans les anciens jardins du palais. Je croise un petit groupe de pillards qui s’arrête sans un mot pour me dévisager et reprend sa marche après mon passage. De toute évidence il n’y a rien d’intérêt pour eux là où je me rends pour l’heure. Là où s’étendaient autrefois la verdure et la richesse du Karamdai, ne reste plus désormais que des jardins désertiques, ou quelques mauvaises herbes arrivent à repousser sous le dôme de protection énergétique installé par les pilleurs.

C’est dans ces jardins quasi stériles qu’une énergie m’attire de plus en plus, une sensation familière, comme la caresse d’une main sur ma joue. C’est là, au milieu de monticules de poussières sulfureuses et de débris, au milieu de plantes sèches et dans ce lieu saccagé que se dresse une stèle dont je m’approche doucement, comme épargnée par le temps et par les périls qu’a subis ce pays. D’elle émane une douce lumière évanescente qui je le sais, n’a cessé depuis des années. Plusieurs pelles, pioches, foreuses artisanales, et débris d’explosifs laissent comprendre que les pilleurs ont essayé de percer les mystères et les richesses de cette stèle énigmatique, mais ils ne pourront jamais rien contre la magie de l’homme qui protège cette stèle comme le plus précieux de ses trésors…

Je pose doucement mes mains sur cette stèle. Et parcourt des doigts les runes qui y sont inscrites, surement illisibles pour des profanes. En d’autres temps, d’autres lieux, peut-être dans une autre vie… peut-être… ça aurait pu être moi qui reposerait là-dessous et que Kami chérirait ainsi… Aurait-il été mon père, ou… mon mari. Mais il n’en est rien, ma vie continue, et se poursuit en cherchant à contrôler la mort elle-même.

Je laisse finalement la tombe de la femme et de la fille de mon mentor pour me diriger vers l’intérieur du palais. Les autrefois immenses portes de l’entrée ont été soufflées, ce qu’il en reste dépecé. Je longe les murs et parcourt les larges couloirs, ces murs autrefois jonchés d’œuvres d’arts sont maintenant couverts d’un vieux sang séché, les tapis sur les sols sont remplacés par ceux qui furent autrefois probablement d’anciens domestiques, soldats, officiers, ou seigneurs de ces lieux , comme un dernier rempart à l’extermination, de nombreuses personnes semblent avoir péris en ces lieux dépouillés de toute lueur de vie ou d’espoir.

Un son très léger derrière moi. Hmmm je suis suivie ? Ils sont vraiment d’une efficacité surprenante en filature ces gars-là pour que je n’ai pu repérer avant ce suiveur inopportun. Ou bien est-ce ce lieu qui déclenche en moi des émotions qui altèrent mes sens ? Je continue à marcher doucement, faisant plus attention. Il est bien seul, avec une de ces sales bestioles qu’ils domestiquent.

Le tuer ? Tant qu’à faire je préférerais éviter que mes hôtes ne me prennent en grippe trop rapidement… Le semer alors ? Je connais bien ce palais mais qu’en est-il des réelles capacités de ce fouisseur domestique ?

Bon si l’option numéro deux ne marche pas on repassera à la numéro un…

Je m’élance donc au travers des allées et des chambrées si familières, traverse tantôt une large salle de banquet vide, tantôt une labyrinthe de portes et d’escaliers empruntés par les gens de maison. Ce petit jeu ne cesse que lorsque je commence à avoir du mal à reprendre mon souffle. Un léger sourire se dessine à mes lèvres malgré cette ambiance mortifère partout où je vais. Oui c’était amusant : se sentir proie mais chasseur à la fois.

J’arrive à une salle vide aux épaisses cloisons. Comme partout des cadavres au sol et des marques d’armes à projectiles et à énergie, sinon des signes d’explosions, sur les murs. N’importe quelle tierce personne verrait là une tentative de fuir ou de se cacher de la part des hommes tombés là dans cette pièce reculée lors de la bataille du dernier jour du Karamdaï. Il n’en est rien en fait car cette pièce recèle une porte vers un passé et des secrets que j’ai moi-même du mal à imaginer. Là sur le mur du fond, de simples runes à nouveau, passant inaperçues pour un œil non averti. Je les active en les effleurant et déclenche un complexe système associant magie et technologie.

Le mur se distord un instant, et je le traverse rapidement avant qu’il ne reprenne consistance pour me retrouver dans une pièce aux parois immaculées et lisses, vierges de tout impact, et là à quelques mètres d'immenses portes, la véritable entrée du bunker, semblent mener directement en enfer.

Là derrière, et sur de nombreux étages sous-jacents, le bunker endormi du Karamdaï demeure. Je n’en connais que l’accès, Kami ne m’a jamais révélé ses lourds mystères… mais s’il y a un seul lieu dans tout Galactica où je peux espérer trouver réponse à mes questions, c’est bien ici.
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Lilou
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Re: Sous les ruines du Karamdaï

Message par Lilou »

Mes mains se posent sur les lourdes portes d’entrée du Bunker et poussent doucement. Rien, les lourds battants ne semblent pas décidés à esquisser le moindre mouvement. Je pousse plus fortement, puis affale tout mon buste sur la face métallique d’une des portes. Rien de plus.

Bien, la force brute ne sert à rien, ou du moins la mienne n’a aucune chance…


Je reste pourtant persuadée que la force de 10 hommes ne suffirait guère plus.

Mais pas une rune sur cette porte, pas une poignée, pas un clavier pour entrer un code quelconque…


Réfléchis, réfléchis…

Un autre moyen ? Un genre de « sésame ouvre-toi » ? Un rituel à accomplir ? Ou peut-être le bunker a-t-il simplement été condamné de l’intérieur voilà bien longtemps déjà ?

Bon, aux grands maux…, dis-je en relevant mes manches.

Pour la mage de métal que je suis, analyser la composition de ces portes inconnues avant de pouvoir les modeler selon mon bon vouloir prendrait des heures, voire bien plus, et ceci en supposant, ce qui m’étonnerait, qu’aucune magie n’altère la mienne en train d’opérer. Jouer sur les jointures donnera peut-être un résultat plus rapide…

De ma ceinture une légère boule de cristacier se détache et s’élève dans les airs jusqu’au niveau de mes yeux. Je repère la zone de jonction des deux battants de portes. Aucun filet d’air ne semble passer depuis derrière ces portes mais si j’arrive à ce que mon cristacier s’infiltre jusqu’au verrou peut-être que je pourrais espérer le faire sauter…

D’un geste de ma main, la boule du précieux métal se rapproche des portes du bunker et s’apprête à commencer son œuvre, perdant consistance. Mais sans aucun signe annonciateur, elle retombe au sol lourdement aussitôt la porte effleurée.


Tssss ! Si tu crois que ça va se passer comme ça !
, dis-je en me concentrant sur mon cristacier.

Mais ni la boule maintenant informe au sol, ni les deux autres encore à ma ceinture ne semblent vouloir bouger désormais, ces dernières me pèsent d’ailleurs de plus en plus.

Je me concentre sur les flux de magie qui émanent de moi et me rends compte qu’ils sont désormais entièrement captés, comme absorbés, par le plafond de la pièce.

Sans que je n’ai encore pu trancher sur le fait qu’il faille ou non continuer d’utiliser ma magie, un bras articulé au bout duquel une sphère est placée sort du plafond de la pièce. La sphère se retourne et un iris bleuâtre apparaît, véritable œil robotique, et semble me dévisager.


Dans toute la pièce résonne une voix artificielle d’un peu trop forte tonalité pour des tympans humains.

Qui va là ?!

J’esquisse un mouvement de surprise. Le bras mécanique se rétracte un petit peu, comme méfiant. Puis se ré avance vers moi, interrogateur.

Un geste de trop, humaine, et la pièce sera décontaminée de toute forme de vie. Qui va là ?


Cesse d’abord cette interférence avec ma magie, machine, et je te répondrai.

L’iris se referme et se réouvre. La voix artificielle prend une tonalité plus humaine, comme si le système encrassé par une longue inactivité, réeffectue le réglage de ses paramètres de communication selon le son de ma propre voix.

Interférence anti intrusion. Non modifiable avant ouverture.

Tsss.

Je cesse immédiatement mes flux de magie. Pas la peine de se fatiguer dans ce cas…

Tu aurais pu apparaître un peu plus tôt, dis-je à l’iris sur un ton de reproche, ça m’aurait évité cette mauvaise surprise.

Je suis activé après détection de flux magiques. Vous ne représentez ni l’un ni l’autre de mes maîtres. Je vous demande à nouveau de vous identifier et la raison de votre venue.

Je suis l’ancienne apprentie de Kami Raykovith. Je souhaiterais en apprendre plus sur ce qu’il est advenu de lui et trouver des réponses à mes interrogations.

L’iris oscille légèrement sur sa position puis s’avance un peu d’avantage vers moi.

Votre identité ?

Léger silence. Mon nom ne m’est toujours pas revenu malgré ces semaines passées depuis ma captivité.

Je... Je n’en sais rien…

L’iris artificielle avance jusqu’au niveau de mes yeux et semble regarder au plus profond de moi au travers de mes propres pupilles. Puis l’iris prend une couleur plus violacée et se referme tandis que le bras métallique retourne d’où il est venu dans un léger rire robotisé.


Tu n’en sais rien ? ahahah.

J’entends une multitude de verrous qui se retirent derrière les portes de l’entrée du bunker l’instant suivant. Portes qui s’ouvrent d’elles-mêmes sur un immense escalier plongé dans le noir passé les premiers mètres encore éclairés de la lumière immaculée de la pièce dans laquelle je suis.

Etonnée, je réactive ma magie et la boule de cristacier au sol vient rejoindre ses sœurs à ma ceinture en un mouvement après s’être reformée en une sphère pure exempte de tout défaut.


C’est… tout ?
, dis-je tout haut d’une voix qui ne dissimule pas son étonnement.

L’unité de contrôle ne se manifeste plus. Il n’y a plus que le silence alentour, et les battements réguliers de mon cœur qui s’emballe.

Pourquoi ce système de sécurité m’a-t-il ouvert si facilement ? Un piège ? Ca serait stupide, il aurait pu m’éliminer facilement selon ses dires. Mais alors ? M’a-il reconnu dans ses fichiers ? Comment est-ce possible ?!


Et cet escalier qui semble un gouffre sans fond devant moi…

Je fais un pas sur la première marche. Immédiatement sur le plafond rectiligne de l’immense descente une multitude des néons s’illuminent sur toute la longueur visible de proche en proche. Le bunker semble ainsi s’enfoncer jusqu’au cœur de la montagne, jusqu’aux entrailles de volcano, sans que je sache dire si cet escalier n’a jamais eu une fin. Cette mise en abîme me donne une impression de vertige.

Après quelques pas j’entends les lourdes portes se refermer derrière moi et les verrous se réenclencher. Tandis que certains des néons au plafond de cette immense décente, qui ont probablement souffert du temps, s’éteignent puis se rallument par intermittence, rajoutant une ambiance un peu glauque je dois dire à ce qui semble être une décente vers les enfers.

Comme si je comptais repartir… Je sens que j’ai tant à apprendre ici : sur qui je suis, mais aussi les plus noirs secrets de l’homme qui m’a construit.

Ange ou démon mon cœur t’appartient Kami, tu le sais.

Je brûlerais des mondes pour toi comme je pourrais les préserver de la destruction.
Un sourire illumine mon visage dans cette lumière artificielle hésitante.

Je n’ai pas peur, non, je n’ai pas peur de ce que je peux découvrir.
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Sergent Kami
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Re: Sous les ruines du Karamdaï

Message par Sergent Kami »

Quelque part dans les entrailles de Karamdaï, une partie des systèmes reprenaient difficilement vie après un sommeil bien trop long. Ici, un vieil écran de contrôle affichait une volée de voyants occultés par une couche de poussière jaunâtre. Là, une porte de sécurité tentait de se refermer sur un obstacle devenu informe et s’en retrouvait bloquée. Les précieuses ressources s’évaporaient, se mêlaient au corrompu. L’unité de contrôle comptait les moyens restants, économisait. A l’instar d’un homme à l’agonie, le bâtiment automatisé accusait les failles et cherchait à enterrer ses secrets avec lui, comme le maître l’avait ordonné.

Deux iris pourpres scrutèrent un écran, puis disparurent lorsqu’un panache de vapeur fuyant d’un tuyau corrodé troubla la quiétude des lieux.

**

La lumière artificielle s’évanouit dans les ailes annexes rendant la progression dans le dédale plus difficile. Ce qui s’annonçait comme une course assurée, guidée par l’instinct se mua vite en une marche hésitante passée dans des salles toutes plus obscures les unes que les autres. La jeune mage tâtonnait çà et là pour ne pas s’échouer contre un meuble abandonné. Lorsqu’elle pensait trouver une solution, les ténèbres se refermaient implacablement sur elle.

Une sensation glaciale lui parcourait l’échine pour résonner au plus profond d’elle-même.

N’était-ce pas ce qu’elle redoutait ? Mourir seule, abandonnée là où personne n’irait chercher sa dépouille ? Sa tête semblait se comprimer sous le coup d’une panique expansive…


Non, ce n’est pas le moment de flancher, murmura-t-elle, tremblante, les mains plaquées contre son visage.

Un sanglot lui fit écho et dans sa détresse la mage sursauta, ayant la sensation de
sa main posée sur son épaule. Une larme se frayait un chemin sur sa joue alors qu’elle vit son sourire.

Les néons grésillèrent pour baigner à nouveau le couloir dans la pénombre. La déserticaine retrouva ses esprits aux abords d’une porte sécurisée, fermée. Sur le mur, une plaque poussiéreuse affichait l’inscription « Kierovanea ». S’époussetant les épaules pour mieux se recomposer une expression digne, la mage ourla une moue dubitative lorsque ses yeux prirent connaissance de l’information.


"Tu as oublié ma langue, n’est-ce pas, résonna sa voix, amusée dans mon esprit.
-Ce n’est pas drôle, protesta la jeune femme. Traduis-moi, au lieu de te moquer !
-Comme si je le pouvais
, murmura-t-il dans un soupir. Ce ne doit pas être ce que tu cherches. Sinon ce ne serait pas aussi…
…Visible. C’était une évidence…"


De toutes manières, la porte ne semblait pas décidée à s’ouvrir… Il ne restait plus qu’à se tourner vers un autre couloir qui…


"Cela ne te fait pas envie, n’est-ce pas", lança-t-il avant d’éclater de rire.

La jeune femme prit une longue inspiration pour toute réponse et esquissa un pas de plus vers les profondeurs.

Les couloirs s’enfonçaient toujours plus loin dans les abysses, là où la tumultueuse planète rouge reprenait ses droits. Au second niveau souterrain, le complexe accusait de lourdes faiblesses. De larges fissures zébraient les murs et parfois, le sol lui-même semblait s’affaisser. Cela n’avait rien de rassurant lorsque jusqu’à son intuition, tout poussait la demoiselle évoluer toujours plus loin. Peut-être trop loin…

Le bruit caractéristique d’un pied glissant sur la roche résonna au détour d’un couloir du sixième niveau. Immédiatement, la mage fit volte-face, prête à cribler de cristacier quiconque oserait se jouer d’elle… et dut faire face au silence pesant… Une secousse se fit sentir.


J’ai dû rêver, murmura-t-elle en se massant la nuque. Sa présence ressentie dans un coin de mon esprit et son sourire la réconforta.

Une autre secousse, plus forte, tira la fugitive de sa rêverie juste à temps pour voir le sol se fissurer sous ses pieds. Cri de panique. Saut en arrière. Le sol s’effondra la seconde qui suivit, offrant une brèche un niveau inférieur déjà ravagé. Ici, une faille dans un mur s’ouvrait sur le lac magmatique plusieurs mètres en dessous. Là une cheminée laissait une fumée ocre et âcre s’élever…


Brèche de sécurité critique dans le secteur 5. Verrouillage du secteur en cours, les personnels sont priés d’évacuer, s’exclama une voix robotisée alors que la femme plaquait le masque à gaz contre son nez et plaçait les lunettes de protection.

En un clin d’œil, l’impertinente mage ressemblait à l’un de ces pillards rôdant dans Karamdaï. Passant la tête au-dessus des gravats, elle jaugeât la possibilité d’utiliser l’opportun raccourci offert par le destin et se laissât glisser sur une rampe naturelle pour retomber pied joints au bord d’une crevasse large d’un mètre.


Me voilà plus proche de toi que jamais, murmura la déserticaine, jubilant.

Elle en était sûre, le graal n’était plus qu’à deux embranchements. Un saut et quelques pas plus tard, la jeune demoiselle fit face à un couloir proche d’un champ de bataille. Le sol s’était effondré çà et là, permettant aux gaz sulfureux de lécher le plafond vers une brèche pour s’échapper vers la surface. Il y avait du sang sur les murs et le corps d’un pillard gisait contre une paroi voisine, figé en position assise.
La fugitive eut un mouvement de recul avant de se raidir lorsqu’un bruit métallique résonna dans le couloir.


Il.. y a quelqu’un ? Je ne suis pas avec eux !
Silence. Je veux juste trouver des réponses !

La déserticaine se hasarda alors à se redresser davantage pour tenter de discerner quelque chose au travers des fumées naturelles avant de voir quelque chose bouger en derrière deux conduites. Un tir d’arme laser ricocha sur le sol cinq mètre devant elle, suivit d’une rafale dont les projectiles balayaient le sol en se rapprochant dangereusement. La femme plongea dans le couloir adjacent juste à temps pour voir les balles cribler le mur derrière elle.

Une secousse plus violente et l’affaissement consécutif la força alors à rebrousser chemin, face au danger. Rien ne se passa. Le tireur avait déjà disparu.

La mage traversa le corridor en prenant d'infinies précautions comme si, en chaque instant, le mystérieux individu allait surgir par une porte et attenter à sa vie. Une fois de plus le néant l'accueillait à bras ouverts alors qu'elle s'apprêter à libérer la fureur du métal sur cet inconnu. Le coeur battant à tout rompre, la déserticaine effleura la porte du laboratoire recherché et vit une ombre se refléter dessus. A sa gauche, dix mètres plus loin, une conduite sous pression céda, imposant un sursaut à l'exploratrice ainsi qu'une projection de cristacier contre un mur résolument inerte...

Un gant de cuir lourd se plaqua sur le bas de son visage, une lame aiguisée contre sa tempe. Cette fois, rien ne vint la rassurer.
Amiral Andrew K. R. Leister, dit le Feu, à votre service.
Un homme éclairé a écrit :Sergent dieu n'aime pas être contredit ! :evil:
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Lilou
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Re: Sous les ruines du Karamdaï

Message par Lilou »

Je n'ai pas le temps de réagir.

La lame d'une arme blanche descend de ma tempe à un creux de peau nue dans mon cou. Elle vient s'appliquer généreusement contre lui de façon à ce que je puisse sentir mes vaisseaux battre contre son tranchant.

Je suis à sa merci. Un mouvement de trop et il est évident que cette arme accomplira sa fonction de mort sans d'une implacable façon.

Le contact est froid. Il contraste tout à fait avec la chaleur ambiante de la pièce, pour laquelle les cheminées magmatiques, dégageant des nuages de vapeur sulfureuse et mortifère ça et là dans ce bunker délabré par le temps, ne sont pas sans lien.

Mon agresseur est sur mon arrière immédiat et me maintient la tête d'une main de fer dans ce gant de cuir. Sur le plan physique elle me fait comprendre pourtant que je n'aurais pas moyen de lutter en ce langage non verbal si agressif.

De mon point de vu je ne distingue plus que cette porte devant moi, derrière laquelle je comptais trouver bien des réponses, et grossièrement dans mon angle, cet assaillant portant un masque à gaz comme moi afin de se préserver des fumées toxiques, et dont je ne peux distinguer aucun trait encore...

Au creux de mon oreille une voix féminine, froide, glaciale vient me prévenir de ses intentions :


Je ne laisserai pas une inconnue repartir avec ses secrets.

Elle a un fort accent, hachant sa phrase et en brutalisant les intonations, mais rien en cette description ne saurait faire rire pourtant. Que ce soit dans ma situation où une autre : cette femme semble imposer un respect posé. Celui de ces êtres dont on ne voudrait pas se faire ennemi mais dont on ne saurait se faire un allié pour autant car insondables dans leurs intentions profondes.

Sa main gantée de cuir me maintenant toujours le visage, elle vient me pousser contre le mur avec le poids de son corps et maintient la pression de sa lame contre mon cou. Un filet de sang chaud vient couler le long de ma peau. La lame apposée est des plus affûtés et une coupure superficielle ne demande qu'à se creuser à la moindre pression supplémentaire exercée.

Qui peut-elle être ? Elle m’aurait déjà tuée si elle l’avait voulu. A moins qu’elle ne veuille jouer avec moi quelques instants encore…


Je ne suis pas des leurs ! Je ne suis pas une pillarde ! Je veux juste en apprendre plus sur Kami Raykovitch et… sur moi…

Elle ne dit pas mot pendant quelques longues et interminables secondes. Je peux entendre nos souffles, rendus bruyant derrières nos masques à gazs respectifs, se calmer peu à peu.

Que faire ? Il me faudrait peu de temps pour projeter le cristacier à ma ceinture contre elle… Cela dit à si faible distance la cinétique ne serait peut-être pas suffisante pour la tuer sur le coup… Et cette lame appliquée contre mon cou à toutes les chances de me percer au moindre faux pas... Il me faudrait être plus rapide, la surprendre et la tuer sur le coup...

Ou bien éloigner cette arme de tout point vital... La sondant de mon esprit de mage de métal, je perçois pourtant qu'en prendre possession ne sera pas envisageable dans un timing si serré..

Alors quoi? Me résigner?! Il y a bien le cadavre de ce pillard à quelques dizaines de mètres... Mais je n'ai pas de vue sur lui, de plus ma concentration est ébranlée dans cette position si inconfortable et puis... depuis combien de temps est-il mort?! Ce pouvoir nécroman que je redécouvre est bien moins efficient sur les corps que les âmes ont abandonnés depuis longtemps... Non je n'arriverais jamais à en prendre le contrôle pour qu'il arrive derrière elle de façon discrète et subtile...

Je dois progresser.


Comme si cette femme, aux allures de mercenaire expérimentée, lisait dans mes pensées elle rajoute brièvement sur le même ton froid et distant :

Ne fais rien de stupide jeune femme, où tu le regretteras.

Aussitôt dit elle retire sa main gantée de mon visage cessant de ce fait une posture qui m’était bien douloureuse et maintenant sa lame commence à me fouiller en me palpant de sa main valide.

Elle retire les quelques armes de faible facture que j’avais pu emmener au cas où mes pouvoirs me feraient défaut, et s’empresse de les glisser à sa propre ceinture.


Il n'y a rien d'autre? Je n'apprécierais pas que tu me mentes.

Je fais signe que non de la tête, déclenchant un nouveau filet de sang le long de mes jugulaires dans une légère grimace douloureuse.

Elle ne semble pas connaître mes pouvoirs ne s'étant attardé sur les boules de cristacier à ma ceinture que pour les palper brièvement et vérifier qu'il ne s'agissait pas là d'engins explosifs ou autres armes conventionnelles...

Son ouvrage finit elle me retourne et me fait face de toute sa hauteur. Elle ne retire pourtant pas sa lame de son emplacement menaçant, maintenant tout à fait le rapport de force actuel qui nous oppose et m’oppresse.

Je la balaye du regard brièvement, tandis qu’elle-même semble m’examiner avec attention.


Ses lunettes de protection et son masque lui recouvrent parfaitement le visage, laissant pourtant paraître au travers de verres salis et rayés par le temps deux iris roses qui n'ont rien de commun et qui me dévisagent attentivement.

Son cou est recouvert d’une sorte d’écharpe rouge ne laissant aucune parcelle de peau à l’air libre tandis que le reste de sa tenue est à l’image de ses gants : tout en cuir, d’un marron lourd et foncé recouvert de ci de là de légères nouures de tissu blancs surajoutés comme pour protéger des blessures passées ou à venir à la manières de bandages médicaux de compression.

Son aspect général n’est pas bien différent de celui des pillards dehors ou encore de celui croisé au bout de ce corridor qu’elle a probablement tué de ses mains… Cependant sur son dos, en bandoulière, je crois discerner ce qui semble être un long et lourd fusil de précision d’un modèle dont les pillards là-dehors auraient du mal à se doter, et qu'ils revendraient immédiatement si cela arrivait... Un modèle militaire qui n’a rien de commun, semblant difficile à manier de prime abord mais redoutable et mortel pour les adversaires de celui qui saura l'employer à son plein potentiel.


Tu as un nom ?, me demande finalement la femme en me jaugeant de la tête aux pieds.

Je… Je ne m’en souviens plus à vrai dire.

La lame de son coutelas se presse un peu plus contre ma peau.

Me prendrais-tu pour une idiote ?

Je la comprends…

Non, c’est la vérité… Je ne me souviens pas de grand-chose sur mon passé… seulement de lui…

Kami.

Je ferme les yeux un instant, mon œil s'embrume sous l'émotion mais aucune larme ne coule sous cette température suffocante à l’intérieur d’un bunker dévasté par le temps, probablement dépourvu de ses protections thermiques passées et souffrant de ce lac de magma contre lui qui le grignote sous mes yeux comme depuis des années probablement.

Elle n’est peut-être qu’une pillarde elle aussi après tout, avide d’en connaître plus sur des secrets que je ne pourrais lui fournir… Pourtant elle m’a dit ne pas vouloir me laisser découvrir « ses » secrets…Ceux de Kami ? Serait-ce un leurre ? Une ruse, encore. Ils ne s’arrêteront jamais.
Je ressens le cristacier contre moi, prêt à bondir sur elle à mon ordre au moindre signe de faiblesse qu’elle m’exposera. Mon cœur bat de plus en plus lentement au fur et à mesure que ma conviction morbide m’imprègne. Non, je refuse d’être torturée, humiliée une nouvelle fois…

Tandis que je réouvre mes yeux humidifiés pour lui faire face d’un regard déterminé je me rends compte que derrière ses lunettes de protections épaisses les yeux roses et froids qui me dévisagent avec curiosité ne cachent pourtant aucune animosité. Et que derrière une résignation froide et déterminée cette femme un peu plus âgée que mois semble aussi curieuse de moi que moi d'elle.

En elle je retrouve un instant le regard parfois glacé de mon guide et de ma seule attache dans ce monde que j’apprends à redécouvrir…L'envie de la tuer me quitte instantanément. Si elle est là c'est pour protéger ses secrets... Elle me la fait comprendre dès ses premiers mots... Et ces premiers tirs à mon encontre... Elle semble aguerrie et maîtriser ses armes comme les lieux à la perfection... Aurait-elle raté ses tirs « consciemment »? Comme... une mise en garde?

Je lui demande d'une voix troublée :


Vous connaissez Kami ?

Son regard ne me lâche pas mais la pression de la lame contre mon cou se fait moindre avant de disparaître tandis qu’elle l’éloigne un peu de mon visage. Une ouverture que je n’ai plus la volonté d’exploiter.

Si tu veux bien me suivre, nous en discuterons ailleurs, me dit la femme toujours pourvue de son fort accent.

Ai-je le choix ?, dis-je un peu mélancolique, me noyant dans un regard qui m'en rappelle un autre.

On a toujours le choix, me répond-elle simplement, peu loquace.

Le choix de la suivre ou de mourir ici en somme?, me dis-je pour moi même.

Mais je sens au plus profond de moi qu'elle est la clé. Oui la clé qui m'attend depuis tout ce temps. Celle qui me permettra d'ouvrir cette porte verrouillée par ma mémoire et par le mystère de cet homme dont je fais inconsciemment mon mentor. Cette clé qui me permettra enfin d'aller de l'avant.

Oui, je vais vous suivre...

Elle m’indique la voie à suivre d’un signe de main. Un couloir détourné un peu plus loin.

Passe devant.

Je m’exécute sur mes gardes tandis qu’elle me suit de près, la lame de son coutelas toujours sortie mais plus aussi menaçante qu'il y a quelques instants.

Je porte une main à mon cou afin de le masser mais aussi de vérifier que la plaie que m'a faite sa lame a bien coagulée. Elle marche sur mes pas, tout près de moi. M'indiquant la voie à suivre de sa main, sans mot dire.

Nous arrivons finalement à ce qui semble être un ascenseur qui ne semble plus être alimenté depuis un temps. Je me retourne sans comprendre tandis qu'un coup net, précis, méthodique vient me percuter le bas ventre.

Je m'évanouis presque sur le coup après une douleur intense mais fugace, m’écroulant sur le sol dans un bruit masqué par celui d’un geyser de vapeur sulfureuse à quelques mètres seulement.


J'ai juste le temps de la voir me faire face, et se pencher sur moi, gardant ce même regard qui me restera en songe jusqu'à mon réveil. Le tien.
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