Grandeur et décadence d'un idéal : Annales Officielles

Ici sont chroniquées les histoires des Etats et de leurs dirigeants

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Nyorg - Yahiko
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Grandeur et décadence d'un idéal : Annales Officielles

Message par Nyorg - Yahiko »

Il était une fois, un petit territoire vertanien paisible et anonyme, comme il en reste tant sur cette planète où les grandes batailles ne sont pas légion. Sans structure politico-administrative arrêtée, sans technologie avancée, mais aussi sans guerre et – presque – sans criminalité, c’était un charmant trou de verdure, qui s’avérait se trouver dans la zone subtropicale de la planète, assez proche de son équateur. Utopia, puisque c’est ainsi que la grande assemblée intertribale réunie toutes les 6 lunes avait décidé de le nommer, bénéficiait donc d’un climat particulièrement luxuriant, d’une nature exubérante et perpétuellement renouvelée qui assurait aux tribus une subsistance confortable pour un effort raisonnable.
La vie y suivait son cours depuis aussi loin que la mémoire des plus grands anciens pouvait remonter, et les événements hors du commun y étaient rares. Occupés à pêcher, à défricher pour limiter la progression de la forêt envahissante, à cultiver ou ramasser les fruits de la nature, rares étaient les Utopiens qui se posaient des questions telles que :


« D’où venons-nous ? Et d’où vient notre sol, notre planète ? Et les étoiles que nous voyons chaque nuit s’allumer dans le ciel ? »

Certains, à l’esprit aventurier, partaient lorsque le jeune âge les poussait à explorer le vaste monde. Jusqu’ici, ils étaient toujours revenus en racontant n’avoir rencontré que de la forêt, déserte d’hommes et semblable à celle que tous connaissent si bien aussi loin que leurs pas avaient pu les porter et à perte de vue, ou alors, ils n’étaient pas revenus. Cet état de fait alimentait les nombreuses légendes sur une planète infinie et présentant toujours le même visage, ou bien sur les abîmes peuplés de créatures fantastiques qui borderaient l’espace où vivent les hommes.

Ce beau conte prit néanmoins fin il y a plusieurs années, quand par une journée ordinaire et semblable à tant d’autres auparavant, d’immenses machines faites d’un matériau inconnu descendirent du ciel et, écrasant au passage maisons et arbres centenaires, se posèrent dans plusieurs villages. D’innombrables créatures humanoïdes mais visiblement mécaniques, sans vie, sortirent de la gueule béante de ces vaisseaux aliens, et, armes à la main, pillèrent sans merci tout ce qu’ils pouvaient trouver sur place : nourriture, minerais, et surtout les précieuses pierres magiques que les chamanes utilisent pour leurs rites religieux.
Les villageois, désarmés et terrifiés, n’opposèrent aucune résistance, et on ne compta aucune victime ce jour-là. La tristesse et la colère furent toutefois grandes dans les mois qui suivirent. Les questions étaient aussi innombrables que les réponses étaient rares.


« Qui étaient ces monstres, ces inconnus venus s’emparer sans vergogne des fruits de vies entières de labeur ? Allaient-ils revenir ? Pouvait-il y en avoir d’autres ? »

Les quelques symboles d'une langue mystérieuse qui ornaient tous les vaisseaux étrangers commencèrent à peupler les cauchemars des Utopiens. Un ancien de l’un des villages, habile de ses mains et surtout plus observateur que ses compatriotes, s’essaya à le dessiner dans la terre battue de sa maison : « lopy ».
Un symbole de terreur et de rage que personne ne s'essaya à prononcer. On s'y référait simplement par l'expression
« les runes ».

Suite à cet événement, tout changea très rapidement en Utopia. Les plus forts s’arrogèrent le pouvoir politique, usant de la gravité de la situation comme prétexte. Ils se confectionnèrent des armes, et affirmèrent qu’il fallait une armée. Les chamanes furent mobilisés manu militari pour transmettre leurs connaissances magiques à tous ceux qui seraient aptes à les apprendre, afin de pouvoir se défendre. De grandes usines se mirent à pousser comme des champignons, et les conditions de travail y étaient terribles : il fallait produire en masse et au plus vite, pour nourrir la population et s’armer.
De grandes bâtisses furent construites où les plus grands esprits des tribus réunis tentaient d’améliorer expérimentalement leur connaissance de la magie de guerre, ou de créer de toutes pièces des machines capables de transporter des hommes dans l’espace. Il fallait explorer aussi loin que possible, pour identifier les menaces et pouvoir s’y préparer.
Avec ces changements, apparurent les puissants et les faibles, les fortunés et les démunis, en bref une société d’inégalité, d’injustice sociale dans un climat délétère où les moins bien lotis enviaient ceux qui réussissaient mieux qu'eux.
Avec eux mourut un idéal.
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Nyorg - Yahiko
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Stabilité militaire : Annales Officielles

Message par Nyorg - Yahiko »

De nombreuses années ont passé depuis la période troublée qui en vint, avec le temps et sous l'impulsion des historiens à la solde du nouveau régime militaire, à être qualifiée de " Révolution nationale ".
L'industrialisation galopante, l'étalement extrêmement rapide des villes, l'exode rural ont, certes, bénéficié à une partie de la population. Les gagnants, peu nombreux, se sont considérablement enrichis, et jouissent maintenant d'un confort matériel certain. Le pays, quant à lui, s'est doté d'une armée et d'une technologie innovantes qui, bien qu'encore balbutiantes, lui offrent la protection contre les attaques extérieures qui était initialement recherchée.
Mais à quel prix ?
Les perdants, eux, ont été forcés de quitter leurs forêts natales, qui reculent tant et plus, le bois étant une ressource très recherchée pour la construction et l'énergie, les terrains ainsi dégagés sont quant à eux utilisés à loisir pour être bâtis d'usines ou d'immeubles, de spatioports flambants neufs ou encore, Ô malheur, de centrales nucléaires à visée militaire. Le mode de vie de vie traditionnel des Utopiens a déjà presque entièrement disparu, et le salariat à l'usine ou dans les services occupent maintenant une majorité de la population active.


Mais des résistances existent également. Des groupes de jeunes gens éduqués, ou au moins débrouillards, ont commencé à se former dans le plus grand secret à l'intérieur de plusieurs hauts-lieux, notamment autour des centres d'enseignement et de recherche. Traqués, emprisonnés, parfois, disent certains, torturés pour les forcer à dénoncer leurs compagnons. Cette barbarie et leur ancrage local souvent fort leur ont bien souvent gagné la sympathie de la population locale, qui les cache ou leur fournit vivres et renseignements, souvent au péril de leur propre sécurité.
Déjà, les moyens de communication modernes, de nature magique ou, - moins souvent - technologique, ont commencé à permettre à ces réseaux de s'interconnecter, d'échanger des idées, des connaissances et parfois d'agir de concert. Face à la répression extrêmement dure, les plus radicaux ne reculent pas même devant l'action violente, et les actes de sabotage sont monnaie courante, dans les quartiers les plus instables.


Plus récemment, de nombreux habitants de la capitale Aitopu, plus grande ville et siège du pouvoir militaire, ont remarqué une activité peu ordinaire autour du spatioport militaire. Des vaisseaux inconnus sortent parfois en formation serrée, au milieu des nuits les plus sombres où les nuages voilent les trois lunes qui éclairent en temps normal le ciel nocturne de l'Utopia. Bien qu'il soit très difficile de les distinguer clairement dans ces conditions, certains jurent avoir aperçu la silhouette de canons de grand envergure se découper dans la pénombre, à la lueur clignotante des gyrophares de signalisation aérienne.

Bien que le régime continue d'affirmer régulièrement que les programmes militaires ont une visée uniquement défensive, et justifie leur existence par les pillages que la population a subis et dont les plus âgés gardent encore un souvenir douloureux, les rumeurs vont bon train.
Un tel affirme que l'État mène des missions d'espionnage dans le plus grand secret pour identifier les auteurs des attaques du passé, tel autre renchérit avec véhémence et martèle qu'il s'agit d'obtenir réparation. Une agression ne peut rester impunie.
D'autres chuchotent même que le pays attaque et pille d'ores et déjà des nations voisines sans défense pour soutenir sa propre économie et entraîner son armée sur le terrain.
Bien que cette thèse soit étayée par des indices troublants, comme la soudaine et apparente prospérité renouvelée qui a conduit les services de propagande du régime à distribuer des rations de nourriture aux plus démunis, dans une tentative quelque peu désespérée de regagner un peu de soutien populaire, peu nombreux sont ceux qui y adhèrent.
" Impossible ", entend-on parfois : ils n'oseraient pas.
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