Le Corrupteur

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Wyatt
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Le Corrupteur

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Le vent s'engouffre dans les vêtements déchirés. Bientôt en lambeaux, ils volètent au gré, comme abandonnés. Le souffle humide propage les gouttelettes de la rivière et fait légèrement entendre un son perceptiblement différent de la simple brise, sans pourtant complètement s’en détacher de l’image. Car si par son intensité il la domine aisément, c’est moins dans sa force que sa palpable agonie. Psaume mélancolique, vogue le râle d’un inconscient qui pleure une ultime fois ses erreurs, la vie au bord des lèvres, mourant à lents pas volontairement. Un délai d’une décennie parait long mais le cœur ne sait voir ce que le prix peut coûter. L’obtention d’un temps de vie admirable, contre la certitude de servir. Et qu’importe qui, tant que le cœur voit devant lui la merveilleuse décennie offerte.

Le vieux pont a l’aspect de l’ancêtre. Usé par le temps, sage par son vécu, grandiose par ce qui en émane. Et de sa solide écorce à de nombreux endroits effritée, il est le gigantesque témoin d’une scène trop souvent répétées. Si la nuit braque ses projecteurs lunaires sur les deux individus en dessous du géant de pierre, c’est peut-être par un hasard presque concevable. Néanmoins, la main sur le cœur de l’un, l’autre récite les cantiques d’une rare langue assourdissante. Et c’est avec détresse que l’atmosphère se met à vibrer, dans un unique mais constant chuchotement.

- Se ‘koyan b§ek akarash n¥oese (Une vie d’or dont seul le temps sera la limite)
- Glaµk ne¤sh ago£rkma fiur ben§eh’ (Puis ton trépas enrichira son essaim)
- Kriβak sa∑k gonorez’ fa₣ (Pactisé pour deux siècles)
- Uelµk anor¤ segoµke kraya’n sh§ek (Jusqu’au silence du cadavre)

Le mourant resplendit de santé. Il se dégage de son torse une intrigante lueur, une tâche ronde liée à cinq branches, la paume doigtée du divin saigneur au service d’un diabolique dessein. L’homme est debout et sourit sans remarquer la sombre nappe recouvrant à présent ses épaules, comme son propre corps bientôt inerte qu’il pourra contempler de ses yeux horrifiés, avant de connaître la morbide lassitude que les nombreuses autres dépouilles lui feront éprouver. Il est seul sous le vieux pont et c’est comme s’il l’était depuis le début. Une fine brume a emporté son funeste bienfaiteur sans tirer de lui le moindre étonnement. Il se tient, nu, au bord de la rivière Silmeria. Son visage couvert de larmes affiche le puissant rayonnement provoqué habituellement par la tendre chaleur du soleil sur la peau. Le condamné entrevoit dans les flots une multitude d’opportunités, maintenant que rien ne lui est impossible. Et c’est sans faire le brave qu’il a l’intention d’hisser son drapeau sur le sommet d’une montagne d’or. La joie le possède et toutes les fibres de son corps sont teintées de quiétude. Son futur bonheur est certain mais ne sera pas éternel et les aiguilles se sont d'ailleurs soudainement accélérées…

… Enogei le corrupteur, de ses yeux glacés, y veille déjà.
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