Toute-puissance et dérives
Publié : 08 sept. 2013, 22:24
La Reine de l'Antioche s'était sentie mortifiée par les propos et comportements ingrats de Klyz. Malgré la fureur de se voir ainsi dénigrée, elle et son État, par l'Alliance dont il lui semblait avoir, ces derniers temps, bien plus vaillamment défendu les intérêts que la majorité de ses membres, elle s'était suffisamment contenue pour ne faire que se retirer de leur espace de discussion, et faire passer le rapport diplomatique entre les Da Krios Rokta et le Léviathan de l'alliance à la neutralité. Le sang de son peuple avait déjà suffisamment coulé pour maintenir le confort de ces messieurs, inutile de faire quelques éclats en claquant la porte, la Reine avait simplement voulu tenir les siens à l'écart, sans la moindre provocation.
Pourtant, le chef du Léviathan avait semble-t-il cru amusant de déclarer la guerre face à ce changement de relation pour lequel il ne fut pas consulté par la Reine, invoquant avec fantaisie le fait qu'il s'agissait là d'une trahison. Oui, le puissant Léviathan, avec son sens toujours aussi aigu de l'honneur, avait déclaré la guerre à une minuscule et inoffensive faction.
Xodia ne pouvait laisser les choses ainsi. Elle ne laisserait pas son peuple et ses alliés se faire flageller pour le bon plaisir de quelques dirigeants. Aucun de ses actes ne fut hostile, et elle estimait cette volonté belliqueuse comme totalement illégitime, comptant bien le clamer haut et fort au Sénat. Elle attaquerait et démonterait cette Alliance dont l'orgueil qui n'était plus tenu par la moindre dignité, depuis bien longtemps.
Certes, la Corporation était finie, écrasée sans gloire par la puissance du Zenob. Certes, le Sénat n'avait plus la moindre valeur judiciaire. Mais il avait toujours été avant tout un lieu d'expression et de débat. La Reine d'Antioche croyait encore, peut-être naïvement, au respect de ces lieux par ses anciens, très anciens amis.
Du moins, c'était le cas avant qu'elle ne pénètre dans l'Arbre. Chacun de ses pas dans les dédales de couloirs végétaux lui paraissait la mener vers ce qui s'apparentait de plus en plus à une destination finale. Une plaidoirie ultime, pour la tranquillité de son peuple, qui pourrait ne trouver qu'un énième bain de sang en réponse. Le Léviathan ne semblait pas s'être intéressé au contrôle du Sénat depuis sa victoire, depuis la chute de la Tour Blanche, depuis la fuite du Grand Conseil, depuis, depuis...
La Reine inspira profondément, tentant de reprendre contenance. En vain.
Ils menaçaient une faction totalement inexpérimentée et militairement insignifiante, comment pourraient-ils avoir l'Honneur de ne pas violer un vieux symbole de la médiation du Grand Conseil ?
Certes, le Lerua Vol les avait rejoints. Mais il ne suffirait pas, sans compte que Xodia doutait qu'il puisse jamais faire feu sur ses alliés si récemment quittés...
Il était cependant trop tard pour reculer. De hautes portes de bois s'ouvrirent sur un amphithéâtre circulaire, aux gradins d'eau tiède solidifiée par la mystérieuse magie de l'Arbre Futur. La monarque n'avait encore jamais vu ce nouveau Sénat, et elle aurait probablement été d'émerveillement en émerveillement en le visitant si la situation n'avait pas été aussi grave, et son corps si crispé par la peur.
Elle s'avança lentement vers la tribune centrale et y attendit, les lèvres pincées et le cœur battant aussi violemment que s'il eût voulu s'enfuir, que quelques personnes viennent assister à son intervention. Elle n'avait que faire de leur identité, et resta d'ailleurs le regard fixée sur le pupitre vide sur lequel elle appuyait ses mains. Il lui fallait simplement des témoins oculaires. Car bien qu'elle savait son intervention retransmise dans toute la galaxie, elle craignait une censure par le Léviathan.
Enfin, elle leva une mine grave.
« Mesdames, Messieurs. Je me permets de me présenter : Xodia, Reine d'Antioche. Ancienne membre du Léviathan, l'ayant quitté pour fonder une faction avec de jeunes rêveurs, tout en gardant à cœur la protection du Léviathan et de ses membre, me considérant toujours comme l'une des leurs.
Léviathan qui, à sa création, se clamait « société se voulant ouverte à tous sans aucune barrière à l’entrée ou à la sortie et sans aucune hiérarchie.», assurant que « tout(e) dirigeant(e) qui le souhaite pouvait y adhérer, parler et agir en son nom, ou ne plus en faire partie sans qu’à aucun moment on ne vienne lui rendre des comptes.» Il prétendait ne vouloir que défendre « nos droits, nos libertés et notre esprit d'entreprise »
Je mets au défi quiconque de me démontrer que c'est encore le cas. Car aujourd'hui, le Léviathan n'est plus dirigé que par une seule et même personne. Seule la loi du plus fort régit son fonctionnement. Aujourd'hui, si d'aventure un allié du Léviathan souhaite blâmer l'un d'entre eux, il se ferait vivement rappeler à l'ordre par leur chef, qui lui intimera de se taire, lui qui n'est « même pas Léviathan ». Voilà ce qui m'est arrivé, messieurs dames.
Blessée dans mon orgueil et mes illusions, j'ai donc voulu m'écarter de tout ce qui me raccrochait encore de leur Alliance, cette société qui, dorénavant, matérialisait la suffisance même. J'ai, entre autres, immédiatement déclaré la relation du Da Krios Rokta avec le Léviathan non plus une alliance, mais la neutralité.
Klyz, en l'apprenant, décida de déclarer les hostilités aux Da Krios Roktas.
Il semblerait que le Léviathan, une fois le Pouvoir gagné, n'ait plus que faire des charmants idéaux annoncés à sa création. Ne compte plus que son Pouvoir, qu'il étend insatiablement, n'ayant que faire de conserver le moindre allié, son chef se considérant comme purement et simplement intouchable.
Puisque que la Corporation est déchue, j'imagine que notre Puissant, Grand et Vénérable Klyz ne trouvera aucune objection au fait de venir s'expliquer à cette tribune du bafouement des promesses de l'Alliance dont il détient les pleins pouvoirs ainsi que de la déclaration de guerre, contre ses propres règles, à une chétive et impuissante faction. J'ose imaginer que Sa Grandeur saura trouver la dignité nécessaire pour entrer dans cette Institution pacifique, où les affrontements sont oratoires, sans éteindre la moindre âme, sans la moindre menace militaire.
Peut-être trouvera-t-il même, dans un sursaut de pertinence, le courage de retirer ses intentions belliqueuses envers des États qu'il pourrait écraser en un éclair et ce, encore une fois, contre les propres principes du Léviathan, supposé ne pas « former un clan, une alliance ou toute autre organisation cloisonnée et fermée. »
Pourtant, le chef du Léviathan avait semble-t-il cru amusant de déclarer la guerre face à ce changement de relation pour lequel il ne fut pas consulté par la Reine, invoquant avec fantaisie le fait qu'il s'agissait là d'une trahison. Oui, le puissant Léviathan, avec son sens toujours aussi aigu de l'honneur, avait déclaré la guerre à une minuscule et inoffensive faction.
Xodia ne pouvait laisser les choses ainsi. Elle ne laisserait pas son peuple et ses alliés se faire flageller pour le bon plaisir de quelques dirigeants. Aucun de ses actes ne fut hostile, et elle estimait cette volonté belliqueuse comme totalement illégitime, comptant bien le clamer haut et fort au Sénat. Elle attaquerait et démonterait cette Alliance dont l'orgueil qui n'était plus tenu par la moindre dignité, depuis bien longtemps.
Certes, la Corporation était finie, écrasée sans gloire par la puissance du Zenob. Certes, le Sénat n'avait plus la moindre valeur judiciaire. Mais il avait toujours été avant tout un lieu d'expression et de débat. La Reine d'Antioche croyait encore, peut-être naïvement, au respect de ces lieux par ses anciens, très anciens amis.
Du moins, c'était le cas avant qu'elle ne pénètre dans l'Arbre. Chacun de ses pas dans les dédales de couloirs végétaux lui paraissait la mener vers ce qui s'apparentait de plus en plus à une destination finale. Une plaidoirie ultime, pour la tranquillité de son peuple, qui pourrait ne trouver qu'un énième bain de sang en réponse. Le Léviathan ne semblait pas s'être intéressé au contrôle du Sénat depuis sa victoire, depuis la chute de la Tour Blanche, depuis la fuite du Grand Conseil, depuis, depuis...
La Reine inspira profondément, tentant de reprendre contenance. En vain.
Ils menaçaient une faction totalement inexpérimentée et militairement insignifiante, comment pourraient-ils avoir l'Honneur de ne pas violer un vieux symbole de la médiation du Grand Conseil ?
Certes, le Lerua Vol les avait rejoints. Mais il ne suffirait pas, sans compte que Xodia doutait qu'il puisse jamais faire feu sur ses alliés si récemment quittés...
Il était cependant trop tard pour reculer. De hautes portes de bois s'ouvrirent sur un amphithéâtre circulaire, aux gradins d'eau tiède solidifiée par la mystérieuse magie de l'Arbre Futur. La monarque n'avait encore jamais vu ce nouveau Sénat, et elle aurait probablement été d'émerveillement en émerveillement en le visitant si la situation n'avait pas été aussi grave, et son corps si crispé par la peur.
Elle s'avança lentement vers la tribune centrale et y attendit, les lèvres pincées et le cœur battant aussi violemment que s'il eût voulu s'enfuir, que quelques personnes viennent assister à son intervention. Elle n'avait que faire de leur identité, et resta d'ailleurs le regard fixée sur le pupitre vide sur lequel elle appuyait ses mains. Il lui fallait simplement des témoins oculaires. Car bien qu'elle savait son intervention retransmise dans toute la galaxie, elle craignait une censure par le Léviathan.
Enfin, elle leva une mine grave.
« Mesdames, Messieurs. Je me permets de me présenter : Xodia, Reine d'Antioche. Ancienne membre du Léviathan, l'ayant quitté pour fonder une faction avec de jeunes rêveurs, tout en gardant à cœur la protection du Léviathan et de ses membre, me considérant toujours comme l'une des leurs.
Léviathan qui, à sa création, se clamait « société se voulant ouverte à tous sans aucune barrière à l’entrée ou à la sortie et sans aucune hiérarchie.», assurant que « tout(e) dirigeant(e) qui le souhaite pouvait y adhérer, parler et agir en son nom, ou ne plus en faire partie sans qu’à aucun moment on ne vienne lui rendre des comptes.» Il prétendait ne vouloir que défendre « nos droits, nos libertés et notre esprit d'entreprise »
Je mets au défi quiconque de me démontrer que c'est encore le cas. Car aujourd'hui, le Léviathan n'est plus dirigé que par une seule et même personne. Seule la loi du plus fort régit son fonctionnement. Aujourd'hui, si d'aventure un allié du Léviathan souhaite blâmer l'un d'entre eux, il se ferait vivement rappeler à l'ordre par leur chef, qui lui intimera de se taire, lui qui n'est « même pas Léviathan ». Voilà ce qui m'est arrivé, messieurs dames.
Blessée dans mon orgueil et mes illusions, j'ai donc voulu m'écarter de tout ce qui me raccrochait encore de leur Alliance, cette société qui, dorénavant, matérialisait la suffisance même. J'ai, entre autres, immédiatement déclaré la relation du Da Krios Rokta avec le Léviathan non plus une alliance, mais la neutralité.
Klyz, en l'apprenant, décida de déclarer les hostilités aux Da Krios Roktas.
Il semblerait que le Léviathan, une fois le Pouvoir gagné, n'ait plus que faire des charmants idéaux annoncés à sa création. Ne compte plus que son Pouvoir, qu'il étend insatiablement, n'ayant que faire de conserver le moindre allié, son chef se considérant comme purement et simplement intouchable.
Puisque que la Corporation est déchue, j'imagine que notre Puissant, Grand et Vénérable Klyz ne trouvera aucune objection au fait de venir s'expliquer à cette tribune du bafouement des promesses de l'Alliance dont il détient les pleins pouvoirs ainsi que de la déclaration de guerre, contre ses propres règles, à une chétive et impuissante faction. J'ose imaginer que Sa Grandeur saura trouver la dignité nécessaire pour entrer dans cette Institution pacifique, où les affrontements sont oratoires, sans éteindre la moindre âme, sans la moindre menace militaire.
Peut-être trouvera-t-il même, dans un sursaut de pertinence, le courage de retirer ses intentions belliqueuses envers des États qu'il pourrait écraser en un éclair et ce, encore une fois, contre les propres principes du Léviathan, supposé ne pas « former un clan, une alliance ou toute autre organisation cloisonnée et fermée. »